Burundi : le colonel Arakaza écroué pour trafic de carburant et tentative d’assassinat, un choc pour l’impunité dans la police
SOS Médias Burundi
Bururi, 19 août 2025 — Le colonel de police Moïse Arakaza, surnommé Nyeganyega, a été arrêté à Bujumbura puis transféré à la prison centrale de Bururi, en province de Burunga dans le sud du pays. Il est poursuivi pour atteinte au bon fonctionnement de l’économie nationale et tentative d’assassinat, relançant le débat sur l’impunité au sein des forces de sécurité burundaises.
L’arrestation du colonel Arakaza, figure controversée de la police burundaise, a surpris de nombreux observateurs. Selon des sources judiciaires, il a été appréhendé le jeudi 14 août dans la capitale économique, avant d’être transféré sous mandat du parquet près la Cour d’appel de Bururi. Depuis lundi 18 août, il est détenu à la prison centrale de Bururi.
Ce mardi 19 août, le colonel Arakaza a été entendu par le substitut du procureur général près la cour d’appel de Bururi, ce qui a abouti à la confirmation de sa détention. Il est officiellement locataire de la prison centrale de Bururi depuis cet après-midi.
Le colonel Arakaza fait face à deux chefs d’accusation : atteinte au bon fonctionnement de l’économie nationale et tentative d’assassinat. Ses deux proches collaborateurs, soupçonnés de faire partie du réseau de contrebande, ont été incarcérés à la prison centrale de Murembwe, à Rumonge (même province). Ils ont été condamnés à une année de prison ferme, entre autres.
Avant d’être arrêtés, le colonel Arakaza et ses coaccusés transportaient des quantités de carburant estimées à plus ou moins 500 litres. La petite nation de l’Afrique de l’Est fait face à une crise carburant depuis 56 mois. Plusieurs fonctionnaires se sont lancés dans la vente illicite de carburant en provenance de la République démocratique du Congo et de la Tanzanie voisine, le prix sur le marché noir pouvant atteindre jusqu’à cinq fois le prix officiel. Des autorités administratives et policières ont été arrêtées ces dernières années pour des faits similaires, avant d’être relâchées, parfois dans des circonstances obscures, et réaffectées à d’autres postes.
Dimanche dernier, le domicile de l’officier a été perquisitionné et plusieurs objets auraient été saisis, mais aucune communication officielle n’a été faite concernant ces saisies, ainsi que celles concernant les maisons de deux conducteurs de taxi-moto, ses voisins. Le colonel Arakaza, qui cohabite avec deux femmes sous le même toit, cacherait du carburant acheté en Tanzanie voisine à son domicile, selon les autorités locales de la commune de Nyanza, dans la province de Burunga.
Un passé marqué par de lourds soupçons
Ce n’est pas la première fois que le nom du colonel Arakaza est associé à des affaires troubles. La société civile et des habitants l’accusent depuis des années d’avoir orchestré violences, enlèvements et autres exactions. Mais jusqu’ici, aucune procédure judiciaire sérieuse n’avait abouti.
« Trop souvent, des officiers soupçonnés de crimes graves échappent aux sanctions. Cette fois-ci, il faut qu’il réponde réellement de ses actes », confie un habitant de Bururi, résumant la colère partagée par de nombreux citoyens.
Un procès sous haute surveillance
Au-delà du cas individuel, l’affaire Arakaza met en lumière les réseaux économiques parallèles liés au trafic de carburant et questionne la capacité de la justice burundaise à résister aux pressions politiques et sécuritaires. La société civile et la population locale attendent un verdict exemplaire. « Un jugement courageux enverrait un signal fort contre l’impunité », martèlent plusieurs organisations de défense des droits humains.
Les prochaines étapes judiciaires seront suivies de près, car l’affaire pourrait constituer un précédent pour la lutte contre l’impunité des officiers supérieurs au Burundi.
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Photo : Le chef-lieu de Bururi où le colonel de police Moïse Arakaza est détenu, en province de Burunga © SOS Médias Burundi
