Kigoma, 2 août 2025- Les autorités tanzaniennes multiplient les pressions sur les réfugiés burundais, recourant cette fois à des menaces déguisées relayées par des organisations humanitaires. Celles-ci ont averti les réfugiés que leurs activités cesseront d’ici décembre 2025, accentuant la peur d’un rapatriement forcé.
La semaine dernière a été particulièrement éprouvante pour les réfugiés burundais installés dans la région de Kigoma, où se trouvent les camps de Nduta et Nyarugusu, principaux lieux d’accueil de cette communauté.
Jeudi, une délégation des autorités tanzaniennes, accompagnée de représentants d’ONGs humanitaires, s’est rendue au camp de Nduta. Le responsable du site n’a pas mâché ses mots, déclarant que la Tanzanie « voit mal la présence des réfugiés burundais sur son territoire ».
Il a ajouté que « tout l’arsenal doit se mettre au service pour que tous les réfugiés rentrent avant les élections présidentielles de 2027 au Burundi », exhortant les ONG à « exprimer leur mauvaise décision qui, malheureusement, plaît à la Tanzanie », a-t-il insinué ironiquement.
Les ONG annoncent la fin de leurs activités
Les ONG présentes dans les camps – Danish Refugee Council (DRC), IRC (International Rescue Committee), World Vision, Save the Children, entre autres – ont pris la parole tour à tour pour confirmer l’arrêt de leurs programmes.
Le représentant de Save the Children a déclaré sans détour :
« Nous ne sommes plus à mesure de continuer à vous donner une assistance du fait du manque de financement. Nous allons fermer en Tanzanie et dans six autres pays. Heureusement que vous avez encore cinq mois pour rentrer chez vous. »
Un message repris « mot pour mot » par les responsables de DRC et IRC.
Ces ONG interviennent dans des secteurs cruciaux comme l’eau, l’assainissement, l’éducation, le logement et l’accompagnement des personnes âgées et handicapées.
Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a, pour sa part, indiqué avoir déjà réduit de 50 % son assistance alimentaire.
« Et rien ne montre que la situation va changer, plutôt, elle risque de s’empirer », a averti son représentant.
Côté santé, Médecins Sans Frontières (MSF) a évoqué le manque de médicaments et la réduction de son personnel, une situation qu’elle attribue à « la politique du gouvernement tanzanien et au manque de financement ».
Réfugiés résignés et silencieux
Rassemblés sur le terrain de la zone 5, les réfugiés n’ont pas osé poser de questions.
« On n’a rien à dire. On constate que notre fin approche. Nous ne pouvons rien faire. Nos cris n’ont finalement pas été exaucés », se sont-ils résignés.
Certains ont qualifié ces interventions de « homélie incriminante », dénonçant une mise en scène destinée à les intimider.
Un chef de village du camp de Nduta, joint par SOS Médias Burundi, a confirmé une tendance inquiétante :
« Les réfugiés s’enregistrent malheureusement en masse pour rentrer. Ils sont pitoyables, nous avons été vendus ! C’est dommage que les humanitaires suivent la cadence du gouvernement tanzanien », a-t-il regretté.
Deux jours plus tôt, la même délégation s’était rendue au camp de Nyarugusu.
« Même mission, même discours, même mot d’ordre », a résumé ce responsable.
Des menaces contraires au droit international
Les réfugiés dénoncent cet acharnement alors qu’ils devraient bénéficier de la protection prévue par la Convention de Genève de 1951, relative au statut des réfugiés. Ce texte définit le statut de réfugié, établit les droits des personnes déracinées ainsi que les obligations des États pour assurer leur protection.
Elle vise à garantir aux réfugiés un traitement aussi favorable que possible, notamment en matière de travail, d’éducation, d’assistance sociale et de liberté de mouvement. Un principe fondamental est celui du non-refoulement, qui interdit aux États de renvoyer un réfugié dans un pays où sa vie ou sa liberté seraient menacées.
Les réfugiés burundais accusent le HCR, pourtant chargé de faire respecter ces dispositions, d’impuissance et d’avoir « failli à sa mission première de protection des réfugiés ».
La Tanzanie héberge encore plus de 110 000 réfugiés burundais, dont l’avenir apparaît de plus en plus incertain à l’approche de la date fatidique annoncée pour décembre 2025.