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Désengorgement des prisons au Burundi : entre chiffres officiels et réalités troublantes

Une prisonnière reçoit des mains du président Évariste Ndayishimiye son billet d’élargissement, lors d’une cérémonie de libération dans le cadre de la grâce présidentielle © SOS Médias Burundi

SOS Médias Burundi

Bujumbura, 18 juillet 2025- Ce vendredi, 49 hommes et 5 femmes ont recouvré la liberté à la prison centrale de Mpimba, à Bujumbura, la capitale économique du Burundi. Ils figurent parmi les bénéficiaires d’une vaste opération de désengorgement des établissements pénitentiaires relancée fin juin dernier à Ruyigi, dans la province de Buhumuza (Est du Burundi). L’opération avait initialement été lancée le 14 novembre 2024 et dénommée “grâce présidentielle”.

Cette opération, lancée dans un contexte de surpopulation carcérale préoccupante, vise à alléger les prisons tout en favorisant la réinsertion sociale des détenus.

Mais selon des prisonniers et des avocats, cette mesure suscite des interrogations. « Il y a des détenus dont les procès étaient encore en cours qui ont bénéficié de cette libération provisoire alors que d’autres qui ont purgé leurs peines ou encore été blanchis par la justice n’ont pas pu en bénéficier. C’est injuste », déplore un avocat basé à Ruyigi.

Selon des statistiques de l’association locale Ntabariza, en charge de la protection des droits des prisonniers, à la seule prison de Mpimba, il y avait 854 personnes détenues illégalement jusqu’en janvier 2025. « C’est-à-dire des détenus qui ont purgé leur peine, ont été libérés provisoirement ou blanchis par les cours et tribunaux », précise un membre de cette organisation.

Même son de cloche du côté de l’Association de lutte contre le chômage et la torture (ALUCHOTO). Dans un rapport confidentiel consulté par SOS Médias Burundi, l’association évoque un « système arbitraire de détention entretenu par des ingérences politiques dans les affaires judiciaires ».

Un prisonnier dont la peine a été purgée il y a plusieurs mois reste incarcéré : « La loi burundaise est à l’envers. C’est le ministère public qui décide qui libérer, alors qu’il fait partie des plaignants. On voit qu’il y a un manque de confiance entre les cours et tribunaux et le ministère public, car une décision d’un juge devrait être exécutée sans l’ingérence du ministère public. »

Au Burundi, les prisons ont une capacité d’accueil limitée à 4 294 places, tandis que la population carcérale dépasse souvent les 12 000 détenus. Certains établissements fonctionnent à plus de 300 % de leur capacité, aggravant les conditions de détention et les tensions internes.

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Photo : une prisonnière reçoit des mains du président Évariste Ndayishimiye son billet d’élargissement, lors d’une cérémonie de libération dans le cadre de la grâce présidentielle © SOS Médias Burundi