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Burundi : les bars paient le prix fort

SOS Médias Burundi

Bujumbura, 18 juillet 2025 – Le ministère du Commerce a annoncé une nouvelle catégorisation et une augmentation significative des frais de licences d’exploitation pour les débits de boissons de type « Modèle C ». Ces nouvelles mesures suscitent une vive inquiétude parmi les propriétaires de bars et bistrots.

Dans un communiqué officiel publié le 14 juillet, la ministre du Commerce, Marie Chantal Nijimbere, a détaillé les changements introduits par les dispositions budgétaires de l’exercice 2025-2026. Jusqu’ici, les établissements classés sous le modèle C devaient s’acquitter d’un montant forfaitaire de 10 millions de FBu (francs burundais) pour obtenir l’autorisation d’ajouter une marge sur les prix officiels des boissons produites par la Brarudi (Brasserie et Limonaderie du Burundi). Désormais, les frais varieront en fonction de la marge appliquée, allant de 10 à 50 millions de FBu.

Une nouvelle catégorisation des licences

Le modèle C a été subdivisé en quatre catégories, selon le niveau de majoration appliqué sur le prix officiel des boissons :

De 1001 à 2000 FBu de majoration : frais de licence de 10 millions FBu

De 2001 à 3000 FBu : 20 millions FBu

De 3001 à 5000 FBu : 30 millions FBu

Au-delà de 5001 FBu : 50 millions FBu

Les propriétaires de ces établissements sont tenus de se conformer à cette nouvelle réglementation et de s’acquitter des frais correspondants avant le 15 août 2025, sous peine de sanctions.

Des réactions vives dans le secteur

Du côté des commerçants, la pilule passe mal. Nombreux sont ceux qui dénoncent une décision qui pourrait fragiliser encore davantage un secteur déjà affecté par les difficultés d’approvisionnement et une baisse du pouvoir d’achat des consommateurs.

« Imaginons que quelqu’un ait déjà payé 10 millions FBu, et qu’on lui demande maintenant de verser à nouveau un montant supplémentaire. Où allons-nous trouver cet argent ? », s’interroge un responsable d’un bar VIP en mairie de Bujumbura, la capitale économique du Burundi. D’autres pointent du doigt les ruptures fréquentes dans la distribution des boissons Brarudi, rendant la situation encore plus intenable pour les exploitants.

La société civile monte au créneau

Face à ces nouvelles mesures, la société civile n’est pas restée silencieuse. Lors d’un point de presse organisé ce vendredi, le directeur de la PARCEM (Parole et Action pour le Réveil des Consciences et le Changement des Mentalités), Faustin Ndikumana, a exprimé ses préoccupations.

Selon lui, au lieu d’augmenter sans cesse les frais de licence, le gouvernement devrait plutôt s’atteler à résoudre les problèmes structurels de la Brarudi, fournisseur principal des boissons. « Partout dans le monde, un État se doit de soutenir les entreprises stratégiques pour garantir leur bon fonctionnement », a-t-il déclaré.

Il dénonce une « insécurité fiscale » due à l’instabilité des coûts des licences, estimant que ces charges supplémentaires risquent de décourager les investisseurs du secteur, voire de provoquer des fermetures massives. « Le gouvernement risque de ne pas collecter les recettes espérées, ce qui pourrait aggraver encore la situation économique du pays », a averti Faustin Ndikumana.

Vers une crise du secteur ?

Certains exploitants envisagent déjà d’abandonner leur activité. « À ce rythme, nous n’avons plus d’autre choix que de changer de métier », confie un tenancier de bistrot du centre-ville de Bujumbura, où sont concentrées les agences des Nations Unies et l’administration centrale. L’incertitude fiscale, conjuguée à la raréfaction des produits, menace sérieusement l’équilibre économique du secteur des boissons.

Alors que la date butoir du 15 août approche, les professionnels du secteur espèrent toujours un assouplissement des mesures ou, à tout le moins, un dialogue avec les autorités pour trouver un compromis viable.

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Photo : L’Amstel, l’une des bières les plus représentatives et consommées de la Brarudi au Burundi. Les autorités burundaises ont pris des mesures jugées injustes par les tenanciers de bars. ©DR