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Sud-Kivu : à Bijombo, la population réclame la réouverture du marché de Mitamba, fermé par les FARDC

SOS Médias Burundi

Depuis plus de trois mois, le marché de Mitamba, situé dans le groupement de Bijombo (territoire d’Uvira, Sud-Kivu), demeure fermé sur ordre des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Une fermeture qui asphyxie la population locale et aggrave une crise humanitaire passée largement sous silence.

Ce marché, autrefois carrefour essentiel pour les communautés locales – Bavira, Bafulero, Banyamulenge, Bashi – ainsi que pour les soldats burundais, les éléments FARDC, les miliciens Wazalendo et les combattants du groupe armé Gumino, était une source d’approvisionnement stratégique en produits de première nécessité. Sa fermeture a eu des répercussions immédiates.

« Depuis la fermeture, nous n’avons plus accès au savon, au sucre ou au sel. Les prix ont explosé », déplore Yohana M., habitant de Kagogo.
« Un sac de sel coûtait 50 000 francs, il est aujourd’hui à 200 000. Le kilo de sucre est passé de 4 000 à 15 000 francs. »

Des accusations de ciblage ethnique

Au-delà des difficultés économiques, des accusations plus graves surgissent. Plusieurs témoignages dénoncent une discrimination ciblée à l’encontre des Banyamulenge, qui seraient délibérément empêchés d’accéder au marché et à l’aide humanitaire.

« Les FARDC interdisent aux Bafulero de Masango, Rubuga et Mbundamo, ainsi qu’aux militaires burundais, de vendre aux Banyamulenge », affirme Éric M., un habitant de Minembwe.

Selon lui, certains doivent parcourir deux jours à pied pour atteindre Bijombo et tenter de s’y approvisionner. Une menace attribuée à un officier FARDC local renforce ces craintes :

« Nous avons fermé le marché de Mitamba. Celui qui sera surpris en train de vendre aux Banyamulenge de Bijombo ou Minembwe sera exécuté », aurait déclaré cet officier, selon plusieurs témoins.

Une crise humanitaire déjà mortelle

Les conséquences de ce blocus ne sont pas uniquement économiques. À Nyakirango, une femme est décédée après son accouchement faute d’accès aux médicaments, en raison de l’isolement de la zone. La route reliant Fizi à Minembwe reste bloquée par des éléments Wazalendo, ce qui empêche la circulation des vivres et du personnel médical.

« Il n’y a pratiquement plus de voie d’approvisionnement possible », alerte un acteur de la société civile.

Contexte sécuritaire tendu

Les autorités militaires justifient cette fermeture par des préoccupations sécuritaires. En avril, trois soldats FARDC auraient été tués à Muramvya, et un autre incident aurait coûté la vie à un jeune de Nyakirango, Nteziryayo, tué par un soldat FARDC.

Depuis ces événements, les déplacements vers Minembwe sont interdits. Les FARDC considèrent désormais cette zone comme étant sous le contrôle du M23 et du groupe armé Twirwaneho.

Un appel à la désescalade

Face à cette situation, les habitants de Bijombo lancent un cri d’alarme. Ils demandent la réouverture urgente du marché de Mitamba et la fin des mesures de rétorsion.

« Ce blocus est en train de tuer notre communauté à petit feu », s’indigne un notable local.

Pour l’heure, ni les autorités provinciales ni le gouvernement central n’ont réagi officiellement. Mais plusieurs observateurs craignent que cette impasse ne ravive les tensions intercommunautaires dans les Hauts plateaux du Sud-Kivu, déjà marqués par des années de violences.

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Photo : Vue aérienne de Minembwe, Sud-Kivu- Les habitants de cette zone enclavée restent bloqués depuis plusieurs mois. Les autorités congolaises considèrent cette région comme étant sous influence du M23, du Rwanda et d’autres groupes armés hostiles à Kinshasa, notamment le M23 et Twirwaneho, un mouvement rebelle à dominante banyamulenge actif dans les Hauts plateaux.  © SOS Médias Burundi