SOS Médias Burundi

Cibitoke, 14 juillet 2025 – Deux cadavres en état de décomposition avancée, vêtus de tenues de la FDNB (Force de défense nationale du Burundi), ont été découverts ce lundi matin sur les rives de la rivière Rusizi, à hauteur de la colline et zone Rukana, commune Cibitoke, dans la province de Bujumbura. Leur identité demeure inconnue et les autorités gardent un silence total, suscitant de nombreuses interrogations.

Selon des témoins locaux, ce sont des pêcheurs qui ont repéré les corps, échoués parmi les roseaux. La Rusizi marque ici la frontière naturelle entre le Burundi et la République démocratique du Congo (RDC). Une fois alertés, des militaires du poste voisin se sont rapidement rendus sur les lieux.

« Ils ont bloqué l’accès à la rivière, interdit tout attroupement, puis ont emballé les corps dans des bâches avant de les charger dans un véhicule militaire », raconte un habitant de Rukana.
« Ils n’ont donné aucune information, et sont repartis aussitôt

Deuxième découverte en deux mois, mais avec des différences notables

Cette macabre trouvaille intervient moins de deux mois après un incident similaire : le 15 mai 2025, deux autres cadavres avaient été découverts dans la même rivière Rusizi, cette fois dans la localité voisine de Rusiga, toujours en commune Cibitoke. À la différence de ce lundi, les corps retrouvés en mai portaient des tenues de l’armée congolaise (FARDC).

Ce sont alors des agents du Service national de renseignement (SNR) qui avaient discrètement récupéré les dépouilles, sans explication publique.

Hypothèses non confirmées

Dans le cas présent, les corps portaient clairement des uniformes de la FDNB, l’armée régulière burundaise. Des sources locales spéculent qu’il pourrait s’agir de miliciens ou d’Imbonerakure, membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD, le parti présidentiel au Burundi depuis deux décennies. Certains auraient participé à des opérations en RDC avant de tenter de regagner le Burundi clandestinement via la Rusizi.

Cette zone frontalière est connue pour être empruntée par des traversées illégales, de nuit, à la nage ou en pirogue. Des témoins affirment avoir récemment observé des groupes traversant discrètement la rivière.

« Il y a souvent des mouvements suspects ici. Mais ces morts restent sans explication », confie un jeune pêcheur de la zone Rukana.

Silence officiel persistant

Interrogé par SOS Médias Burundi, le chef de zone de Rugombo a déclaré ne pas être informé de la découverte.
Du côté militaire, le commandant du 112ᵉ bataillon d’infanterie basé à Cibitoke a éludé toute question, se contentant de dire :

« Le moment n’est pas encore venu pour donner des informations. »

Inquiétude et confusion dans la population

L’absence de communication officielle laisse la population dans l’incompréhension totale. L’enchaînement de découvertes de cadavres militaires dans la Rusizi — d’abord en uniforme des FARDC, maintenant en uniforme de la FDNB — soulève des questions sur les relations militaires régionales, les opérations transfrontalières secrètes, ou même d’éventuelles rivalités internes.

« Deux corps en mai, deux autres en juillet… et toujours aucune explication. Que se passe-t-il sur notre territoire ? », s’interroge un notable local.

En attendant des éclaircissements, la Rusizi continue de charrier son lot de mystères — et de cadavres. La population, elle, reste dans l’angoisse face à ce silence troublant des autorités.

_____________________________________________________

Photo : deux hommes sur une barque dans la rivière Rusizi, non loin de l’endroit où deux corps en tenue militaire ont été retrouvés © SOS Médias Burundi.