« Le Burundi est en danger » : l’opposition en exil dénonce une « farce électorale » et appelle à une mobilisation

SOS Médias Burundi
Bruxelles, 28 juin 2025 – La coalition politique de l’opposition burundaise en exil a tenu une conférence de presse ce vendredi dans la capitale de l’Union européenne. Un rendez-vous pour dénoncer les scrutins communaux et législatifs du 5 juin dernier au Burundi, que ces opposants qualifient de « farce électorale », annonçant le retour de « la dictature d’un parti unique ».
« Le Burundi est en danger », a alerté Frédéric Bamvuginyunvira, président du CFOR-Arusha, accompagné de Libérat Nibashirakandi, porte-parole de MAP-Burundi, et de Chauvineau Mugwengezo, porte-parole de la Coalition pour la Renaissance de la Nation (CN) et président de l’UPD-Zigamibanga (aile non reconnue par le gouvernement).
Une campagne électorale sous tension
Selon les observations des reporters de SOS Médias Burundi, la campagne électorale s’est déroulée dans un climat de peur généralisée, d’intimidations et de violences ciblées contre les opposants et supposés opposants.
Les militants de l’opposition ont été régulièrement empêchés d’organiser des rassemblements, agressés ou menacés, notamment par des membres des Imbonerakure, la ligue de jeunesse du parti CNDD-FDD.
Des actes d’intimidation, des passages à tabac, des arrestations arbitraires et des destructions de matériel électoral de l’opposition ont été signalés dans plusieurs provinces.
Le jour du scrutin, des cas de fraudes massives ont été rapportés. Plusieurs électeurs ont dénoncé des opérations de vote forcé et des irrégularités flagrantes, notamment des votes multiples et la confiscation des cartes d’électeurs appartenant aux sympathisants de l’opposition.
Dans certains centres, des membres de la société civile et des observateurs indépendants ont été empêchés d’accéder aux bureaux de vote.
« C’était une élection verrouillée de bout en bout », commentent les reporters de SOS Médias Burundi, soulignant que l’environnement n’a pas permis une compétition électorale libre et équitable.
Un bilan amer de la situation au Burundi
Pour Bamvuginyunvira, ancien vice-président, la situation dans le pays est catastrophique.
« Plus rien ne fonctionne. Le Burundi est classé parmi les pays les plus pauvres au monde. Les Burundais font face à une inflation galopante, à la pénurie de carburant et à la cherté de la vie. Comment expliquer ces scores électoraux écrasants dans un pays où tout le monde crie famine ? », s’interroge-t-il.
« Ces gens-là s’imposent à la tête de l’État par la force des armes, par la manipulation et en faisant peur à la population », a-t-il ajouté.
Une communauté internationale pointée du doigt
Libérat Nibashirakandi a dénoncé ce qu’il considère comme la passivité de la communauté internationale face à ce qu’il qualifie de mascarade électorale.
« Le Burundi a organisé trois vraies élections : après l’indépendance, en 1993 et en 2005, sous supervision internationale. Ce qui se passe aujourd’hui n’a rien à voir avec des élections crédibles », a-t-il rappelé.
Le porte-parole de MAP-Burundi s’en est également pris à certains pays de l’Union européenne : « Comment peut-on financer un pouvoir qui tue et qui viole ? C’est inacceptable ! »
Une opposition en quête de stratégie
Face à cet état de fait, l’opposition en exil veut miser sur la force des idées et sur une réorganisation stratégique.
« Le CNDD-FDD ne veut s’imposer que par la force. Nous avons tenté des négociations, des rencontres, mais rien n’a marché. Le CNDD-FDD ne comprend que le langage de la force. Est-ce que nous pouvons trouver une force capable de le déloger ? », s’est interrogé Bamvuginyunvira.
Il a appelé à une prise de conscience collective au sein de l’opposition :
« Nous devons accepter ce que nous sommes. Nous sommes une opposition. Nous devons porter un projet de société et organiser une force capable de remplacer ce pouvoir. »
Mobiliser la communauté internationale
Pour Nibashirakandi, la pression doit aussi venir de l’extérieur. Il préconise une campagne de sensibilisation auprès de l’Union européenne pour couper les financements au régime en place.
L’opposition en exil affirme également être en contact avec des opposants à l’intérieur du Burundi et que des échanges réguliers se poursuivent.
« Il est peut-être temps que l’opposition burundaise se rassemble et parle d’une seule voix », a conclu Bamvuginyunvira.
« Il faut que le peuple burundais fasse ensemble un constat lucide : le pouvoir en place a échoué. Le salut du Burundi passe par une réflexion collective et une mobilisation de tous ceux qui aspirent à un véritable changement. »
Une victoire totale du CNDD-FDD
Lors des législatives et communales du 5 juin dernier, les premières organisées séparément de la présidentielle désormais reportée à 2027 dans la petite nation de l’Afrique de l’Est, l’ancienne rébellion hutu au pouvoir au Burundi depuis 2005 grâce à l’accord de paix d’Arusha d’août 2000 a remporté la totalité des sièges à l’Assemblée nationale.
La Cour constitutionnelle a confirmé la validité des résultats des élections législatives et communales, rendant sans effet les réclamations de l’opposition.
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Photo : Innocent Muhozi, directeur de la télévision Renaissance en exil, coordonne les échanges entre les opposants Libérat Nibashirakandi, Frédéric Bamvuginyunvira et Chauvineau Mugwengezo, lors d’une conférence de presse tenue à Bruxelles, le 27 juin 2025 © SOS Médias Burundi