« La vie est devenue invivable » : les veuves burundaises accablées par la précarité et l’injustice

SOS Médias Burundi
À l’occasion de la Journée internationale des veuves, plusieurs Burundaises brisent le silence pour témoigner d’un quotidien marqué par la pauvreté, l’abandon, les injustices familiales et la flambée des prix. Beaucoup disent se sentir oubliées par l’État et livrées à elles-mêmes.
Clotilde Macumi, résidente du quartier Mirango, au nord de Bujumbura, a perdu son mari il y a cinq ans. Depuis, sa vie a basculé.
« Après sa mort, mes enfants ont dû quitter l’école. Je travaille comme aide-maçon, un métier éprouvant, mais je n’arrive plus à nourrir ma famille », confie-t-elle. Elle déplore en particulier la hausse vertigineuse des prix : « Aujourd’hui, il est difficile de se procurer de la nourriture en quantité suffisante et de qualité. Les produits de première nécessité sont devenus inaccessibles. »
Anne Marie Kaneza, veuve dans la trentaine, vit une double épreuve : la perte de son époux, suivie de conflits familiaux.
« Ma belle-famille me harcèle en justice pour récupérer une part de la parcelle laissée par mon mari. Avant son décès, je n’avais jamais connu ce genre de problème. Aujourd’hui, je dois tout assumer seule avec mes jeunes enfants », explique-t-elle.
Calinie Minani, retraitée et mère de plusieurs enfants encore mineurs, exprime un profond sentiment d’abandon.
« Avec ce pouvoir en place, nous sommes comme des orphelins. Les veuves comme moi n’ont ni appui ni protection. J’ai encore des enfants de moins de vingt ans, et je ne sais comment répondre à leurs besoins », dit-elle avec amertume.
Une autre veuve, vivant dans la zone périphérique de Rubirizi, dénonce un désengagement total des autorités.
« Le pouvoir ne se soucie pas de nous. C’est comme si le pays naviguait sans pilote. Mon mari a été assassiné en 2016, et mes enfants vivent toujours dans la peur. L’avenir est sombre. Même mon entourage partage ce désespoir. Les prix sont inabordables, nous allons mourir de faim. En tant que veuves, nous sommes livrées à une détresse absolue, sans aucun secours », témoigne-t-elle, la voix chargée d’émotion.
En ce 23 juin, ces femmes disent n’avoir aucune raison de célébrer : elles se sentent ignorées par les politiques publiques et piégées dans une misère croissante. Pour elles, la Journée internationale des veuves ne fait que souligner leur invisibilité et leur souffrance.
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Photo : Une femme avec un enfant au dos devant la cour d’appel de Gitega, mars 2020. © SOS Médias Burundi