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Enseignement au Burundi : des députés alertent sur une dégradation alarmante du système éducatif

SOS Médias Burundi

Autrefois cité en exemple en Afrique centrale et de l’Est, le système éducatif burundais traverse aujourd’hui une crise profonde. À l’Assemblée nationale, plusieurs députés ont tiré la sonnette d’alarme, évoquant une dégradation alarmante du niveau scolaire, en particulier dans les compétences linguistiques. Le gouvernement reconnaît les défis, mais temporise, en attendant de pouvoir engager des réformes de fond.

Depuis les années 1970, le Burundi a multiplié les réformes dans le secteur de l’éducation. Mais ces changements, souvent appliqués sans stratégie cohérente ni évaluation sérieuse, ont peu à peu érodé la qualité de l’enseignement. Le constat actuel est sévère : les élèves burundais, à quelques exceptions près, peinent à rivaliser avec ceux des pays voisins.

Cette chute du niveau scolaire compromet la compétitivité nationale, notamment en matière de ressources humaines. Selon de nombreux observateurs, l’école burundaise n’assure plus son rôle traditionnel d’ascenseur social.

Un effondrement des compétences linguistiques

Parmi les indicateurs les plus préoccupants figure le recul généralisé des compétences linguistiques. Du kirundi au français, en passant par l’anglais ou le kiswahili au niveau primaire, la maîtrise des langues connaît une nette détérioration.

« De nombreux élèves ont aujourd’hui du mal à formuler une phrase correcte en français ou à conjuguer les verbes les plus simples », déplore un enseignant du secondaire.

Ce déficit ne freine pas seulement la progression dans les autres disciplines, mais pénalise également l’ouverture du pays aux échanges régionaux et internationaux.

Une inquiétude croissante au sein du Parlement

Devant la gravité de la situation, plusieurs parlementaires ont exprimé leur inquiétude au cours des récentes sessions à l’Assemblée nationale. Ils demandent la mise en œuvre urgente des recommandations issues des états généraux de l’éducation.

« Chaque jour qui passe sans mesures concrètes aggrave la crise et compromet l’avenir de notre jeunesse », a lancé un député lors d’un débat houleux au Parlement.

Parents et enseignants désemparés

Sur le terrain, notamment dans les quartiers populaires de Bujumbura, le malaise est palpable. Nadine, mère de trois enfants inscrits à l’école publique, se dit désabusée :

« Mes enfants n’arrivent même plus à lire un texte simple en français. Et pourtant, ils passent chaque année en classe supérieure. C’est comme si les diplômes avaient perdu toute valeur. »

Les enseignants partagent ce désarroi. Pour le Syndicat des Travailleurs de l’Enseignement au Burundi (STEB), la situation résulte notamment du manque de formation continue, de la surcharge des classes et d’une profonde démotivation.

« Tant que les enseignants seront mal rémunérés et sans perspectives d’évolution, on ne peut pas attendre d’eux un rendement de qualité », affirme un représentant du syndicat.

Le gouvernement prudent, mais conscient

Interrogé sur cette crise, le ministre de l’Éducation et de la Recherche scientifique, le professeur François Havyarimana, a reconnu les carences actuelles du système éducatif.

« Nous sommes conscients de la nécessité d’une réforme en profondeur des programmes, mais cela exige des investissements conséquents », a-t-il indiqué, ajoutant que le gouvernement attend les conclusions du Conseil des ministres avant d’engager des mesures concrètes.

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Photo : Dans une salle de classe burundaise, une élève se lève pour répondre à une question de son enseignant. Malgré les efforts, le système éducatif du pays connaît une dégradation inquiétante © SOS Médias Burundi