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Burundi – Engrais introuvables : des agriculteurs ont payé, mais attendent toujours

SOS Médias Burundi

En pleine saison culturale, des milliers d’agriculteurs burundais attendent toujours l’engrais urée pourtant déjà payé. Une situation critique qui met en péril leurs récoltes, relance le débat sur la dépendance aux importations et met en lumière les failles du système de distribution.

Dans les collines de Cibitoke comme ailleurs dans le pays, la frustration monte. Les semences sont déjà en terre, mais l’engrais urée, indispensable à la croissance de certaines cultures comme le riz, se fait toujours attendre.

« J’ai payé en avril pour recevoir l’urée, mais à ce jour, je n’ai rien reçu. Mes champs de riz risquent de sécher », alerte Jean-Marie, agriculteur à Rugombo. « On nous demande d’être patients, mais la terre, elle, ne nous attend pas. »

Des paiements sans livraisons

De nombreux agriculteurs se retrouvent dans la même situation : avoir déboursé de l’argent pour des intrants qui n’arrivent pas. Cette pénurie d’urée, pourtant planifiée, expose les limites d’un système dépendant de l’importation et d’une logistique fragile.

Le secrétaire permanent au ministère de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Élevage, Emmanuel Ndorimana, confirme les difficultés d’approvisionnement. Il explique que l’urée, importée et achetée en devises, subit des retards liés à des contraintes d’accès au marché international.

Il invite les agriculteurs concernés à présenter leurs reçus pour bénéficier d’une nouvelle phase de distribution centralisée au niveau communal. Mais sur le terrain, les espoirs s’amenuisent au fil des jours.

L’espoir d’une production locale

Face à cette récurrence des pénuries, le gouvernement mise sur l’avenir. Deux usines de production d’engrais sont en cours de construction à Bugendana (province de Gitega) et Bukemba (province de Rutana). Objectif : réduire la dépendance aux importations et assurer un approvisionnement local, stable et durable.

En attendant, l’usine FOMI (Fertilisants organo-minéraux industriels) continue de produire « Imbura », un engrais local encore disponible en stock. Toutefois, de nombreux agriculteurs soulignent que ce fertilisant ne peut remplacer efficacement l’urée, notamment pour les cultures exigeantes comme le riz.

Une demande en forte hausse

Autre défi : la flambée de la demande. Selon les chiffres officiels, elle est passée de 17 à 109 tonnes en quelques mois à peine. Un bond qui a mis sous pression toute la chaîne logistique et retardé encore davantage les livraisons.

Lors d’une récente intervention, le Premier ministre a assuré que l’agriculture reste une priorité nationale. Il a rappelé les efforts du gouvernement pour subventionner les intrants agricoles et maintenir leur accessibilité. Mais il a également appelé les producteurs à « faire preuve de patience ».

Comprendre les engrais utilisés au Burundi :

  • Urée : importée, elle favorise la croissance végétative et est particulièrement utilisée dans la riziculture. Son acquisition dépend des devises étrangères.
  • Imbura : fertilisant local produit par FOMI, adapté à plusieurs cultures vivrières comme le maïs et les haricots, mais jugé peu efficace pour le riz.
  • DAP et NPK : également importés, moins sollicités dans certaines régions, mais utiles selon le type de culture.

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Photo : Une cultivatrice dans un champ de maïs en province de Kirundo, au nord du Burundi.
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