Élections au Burundi : l’Église catholique dénonce des irrégularités, le gouvernement minimise
SOS Médias Burundi
Bujumbura, 13 juin 2025 — Dans un communiqué rendu public ce 12 juin, la Conférence des évêques catholiques du Burundi a exprimé de sérieuses inquiétudes sur le déroulement du double scrutin du 5 juin. Mgr Bonaventure Nahimana, son président, s’est appuyé sur les rapports de plus de 2400 observateurs déployés dans environ 30% des bureaux de vote pour dénoncer des irrégularités susceptibles d’affecter la crédibilité du processus électoral.
Malgré un climat globalement calme le jour du vote, selon les observations recueillies, les évêques affirment que « le chemin vers l’organisation des élections libres, transparentes et apaisées est encore long ».
Parmi les anomalies relevées : ouverture anticipée de certains bureaux de vote en l’absence des mandataires, refus d’accès aux observateurs, urnes déjà remplies à leur arrivée ou encore partialité manifeste de certains agents électoraux. Dans plusieurs cas, des électeurs auraient été contraints de voter pour des candidats imposés ou empêchés d’exercer librement leur droit de vote.
Des procès-verbaux controversés
Mgr Nahimana a également mis en garde contre la signature de procès-verbaux par certains observateurs, en violation des dispositions légales. Des pratiques qui, selon lui, entachent la transparence et la légitimité des résultats proclamés. Pour l’Église catholique, il est temps de « repenser et réajuster la manière de concevoir la démocratie » au Burundi, en s’attaquant tant aux failles du cadre légal qu’aux dysfonctionnements dans l’organisation des scrutins.
Le gouvernement tempère
Interrogé sur ces accusations, le ministre de l’Intérieur Martin Niteretse a reconnu, lors d’une conférence de presse ce jeudi, l’existence de quelques « incidents mineurs » rapidement corrigés. Il cite notamment des cas de cartes d’électeurs déchirées ou des pressions exercées sur certains votants, mais affirme que des mesures immédiates ont été prises pour y remédier.
Le ministre a aussi mis en cause certains acteurs politiques, qu’il accuse de vouloir discréditer les résultats sans avoir formulé de contestations officielles le jour du vote. « Celui qui nie les résultats du vote commet un délit et sera puni conformément à la loi », a-t-il déclaré, appelant à la retenue et au respect de la paix publique.
Un appel à la réforme démocratique
Dans un ton à la fois pastoral et engagé, Mgr Nahimana a rappelé que seule une démocratie fondée sur « la vérité, la justice, la charité et la paix » permettra d’édifier un Burundi plus juste et plus uni. Il appelle les autorités, les partis politiques et la société civile à renforcer les mécanismes démocratiques pour garantir à chaque citoyen la liberté de choisir ses dirigeants.
Une démocratie burundaise à la croisée des chemins
Cet épisode électoral, marqué par des positions diamétralement opposées entre l’Église et le gouvernement, remet en lumière les tensions persistantes sur la question de la transparence électorale au Burundi. Reste à savoir si ces signaux seront ignorés ou pris comme point de départ pour bâtir une démocratie plus solide et inclusive.
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Photo : le président Évariste Ndayishimiye, la Première dame Angéline Ndayubaha et plusieurs hautes autorités se recueillent devant une statue de la Vierge Marie à Mugera, aux côtés des évêques catholiques du Burundi. Ce sanctuaire, situé dans la province de Gitega, est le lieu de pèlerinage marial le plus fréquenté du pays, notamment lors des célébrations de l’Assomption © SOS Médias Burundi
