Tanzanie : treize enfants burundais emprisonnés pour avoir réclamé leur salaire

SOS Médias Burundi
Depuis plus de trois mois, treize adolescents burundais sont détenus à la prison de Nyamisivya, dans le nord-ouest de la Tanzanie. Leur tort : avoir demandé à être payés pour le travail accompli dans des plantations de tabac. Âgés de 12 à 18 ans, ils avaient quitté leurs collines natales en quête de moyens de survie.
Leurs témoignages, recueillis par SOS Médias Burundi, décrivent une réalité brutale. Engagés comme main-d’œuvre saisonnière, ces jeunes espéraient gagner quelques shillings en travaillant dans les champs. Au lieu de cela, leur expérience s’est muée en cauchemar.
Deux d’entre eux ont réussi à échapper aux arrestations. Le premier se souvient de cette nuit où des miliciens tanzaniens, armés de bâtons, ont débarqué.
« Ils nous ont rassemblés et accusés de faire du désordre parce qu’on réclamait nos salaires », raconte-t-il.
« Ils sont repartis, puis revenus avec des policiers. Moi, j’ai eu de la chance. J’étais aux toilettes. Je me suis caché. Le lendemain, j’ai pu rentrer au Burundi. »
Le second avait quitté les lieux un jour avant la dernière rafle, survenue le 5 mai.
« J’avais travaillé pendant 18 mois, dont 12 sans salaire. Mon second patron a eu pitié de moi. Il a donné de l’argent aux miliciens pour qu’ils me fassent passer la frontière clandestinement », confie-t-il.
Ils étaient quinze au départ. Treize ont été arrêtés, deux ont réussi à fuir. Tous étaient des enfants, ou à peine plus. Leur seul crime : avoir tenté de survivre en vendant leur force de travail.
Selon les informations recueillies par SOS Médias Burundi, ce cas n’est pas isolé. Depuis l’an dernier, plusieurs centaines de Burundais ont été arrêtés en Tanzanie après avoir osé demander leur dû, ou interceptés alors qu’ils tentaient de rentrer chez eux. Dans certains cas, les arrestations sont effectuées par des miliciens affiliés au parti au pouvoir en Tanzanie. Beaucoup de ces saisonniers finissent incarcérés, sans procès ni assistance juridique.
Les autorités tanzaniennes affirment qu’un accord est en cours de négociation avec le gouvernement burundais en vue de la libération des treize mineurs emprisonnés à Nyamisivya. Mais sur le terrain, rien n’avance. Aucune date n’a été fixée, aucun procès annoncé. Les familles, des deux côtés de la frontière, vivent dans l’angoisse et l’attente.
Pendant ce temps, ces treize jeunes dorment toujours derrière les barreaux. Pour avoir simplement demandé à être payés.
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Photo : Une pancarte indiquant le tribunal du district de Kibondo, en Tanzanie, où de nombreux Burundais sont contraints de comparaître ces derniers mois, souvent après avoir réclamé leur salaire ou lors de leur retour au pays © SOS Médias Burundi