Giharo : des intimidations ciblées et des exclusions flagrantes entachent le scrutin communal
SOS Médias Burundi
La tension électorale ne cesse de monter dans la commune Giharo, en province de Rutana (sud-est du Burundi), à mesure que se multiplient les témoignages faisant état de graves irrégularités. Intimidations, harcèlement et exclusions ciblées de représentants de partis d’opposition semblent s’être multipliés sur fond de favoritisme assumé envers le parti au pouvoir, le CNDD-FDD.
À l’école Kabingo I, des électeurs ont été conduits jusqu’aux urnes par des membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD, les Imbonerakure. Une fois sur place, ces derniers leur rappelaient ostensiblement de « ne pas se tromper de vote » et de suivre les consignes données en amont. Selon un membre du bureau de vote, qui s’est exprimé sous couvert d’anonymat, ces menaces à peine voilées visaient à assurer un vote massif en faveur du CNDD-FDD.
Dans les zones de Gakungu et de Muzye, tous les mandataires des partis d’opposition ont été expulsés des bureaux de vote. Les opérations électorales ont ainsi été placées sous le contrôle exclusif de partisans du parti présidentiel. À Giharo centre, aucun représentant d’un autre parti n’a été autorisé à superviser le déroulement du scrutin. Les résultats affichés sur les listes donneraient un score écrasant au CNDD-FDD, les autres formations politiques étant systématiquement créditées de zéro voix — aussi bien pour les élections communales que pour les législatives.
Un incident particulièrement préoccupant a été signalé à Mutwana. Ézéchiel, jeune militant de l’UPRONA, a été la cible d’une tentative d’extorsion de la part du chef de colline, Vincent Nemerimana. Celui-ci aurait exigé 50 000 francs burundais, accusant Ézéchiel de mener des activités de campagne contre le CNDD-FDD. Après avoir refusé de payer, le jeune homme aurait été suivi et menacé de détention par des Imbonerakure mobilisés à cet effet. Sous la pression, il aurait finalement cédé la somme exigée, ce qui aurait entraîné sa libération.
Malgré les alertes lancées par ses proches, et en dépit de l’absence de preuves contre lui — Ézéchiel ne possédait même pas de carte d’électeur — les autorités locales n’auraient pris aucune mesure. Leur silence alimente les craintes d’une impunité généralisée.
Ces incidents traduisent une dérive préoccupante dans la commune Giharo, où les principes démocratiques semblent mis à mal par des méthodes d’intimidation systématique et d’exclusion orchestrée. Alors que le processus électoral est censé refléter la volonté du peuple, nombre d’observateurs s’inquiètent de voir la démocratie reculer au profit d’un autoritarisme de plus en plus décomplexé.
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Photo : Dépouillement des voix dans un bureau de vote en province de Rutana, dans le sud-est du Burundi, le 5 juin 2025 © SOS Médias Burundi
