Murwi : deux orpailleurs tués après un meeting du CNDD-FDD, la population sous le choc

SOS Médias Burundi
Deux jeunes orpailleurs, membres du CNDD-FDD, ont été retrouvés morts ce samedi matin à Gisaba, commune Murwi. Leur assassinat survient quelques heures après un meeting politique du parti au pouvoir. L’événement a plongé la population locale dans la peur et ravivé les tensions dans cette région frontalière déjà instable.
Les habitants de Gisaba, en commune Murwi (province de Cibitoke), se sont réveillés dans la stupeur ce samedi matin. Deux corps sans vie, ceux de Marc Nzeyimana (30 ans) et Juventus Kubwayo (28 ans), ont été retrouvés près d’un site d’orpaillage local. Tous deux étaient membres actifs du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, et avaient assisté à un meeting politique la veille. Leur assassinat brutal plonge la communauté dans l’incompréhension et fait ressurgir les tensions dans cette région en proie à une insécurité persistante.
Les deux victimes portaient encore des tenues aux couleurs du parti présidentiel au moment de la découverte de leurs corps, abandonnés sur la colline Gisaba, zone Buhindo. Selon les premiers éléments recueillis, elles revenaient d’un rassemblement du CNDD-FDD organisé au chef-lieu de la province de Cibitoke. D’après des sources sécuritaires, elles auraient été ciblées alors qu’elles transportaient quelques grammes d’or, possiblement le mobile du crime.
« Ils ont été froidement assassinés, puis dépouillés », affirme un agent de sécurité local, sous couvert d’anonymat.
Des traces de violences extrêmes ont été relevées sur les corps : les assaillants auraient utilisé des armes blanches, notamment des machettes et des couteaux. Une corde aurait également servi à étrangler l’un des deux hommes.
Si les auteurs du double meurtre ne sont pas encore identifiés, les soupçons se tournent rapidement vers des membres présumés des Imbonerakure, la ligue des jeunes du CNDD-FDD. Plusieurs habitants évoquent un climat de peur entretenu par ces groupes dans la région.
« Ils sont régulièrement impliqués dans des actes d’intimidation et de vol. Ce n’est pas la première fois que des violences leur sont attribuées », témoigne un résident de Gisaba.
Des accusations que rejette en bloc l’administrateur communal de Murwi, Melchiade Nzokizwanayo :
« Ce sont des mensonges sans fondement. Nous appelons la population à coopérer avec les forces de l’ordre pour faire avancer l’enquête », déclare-t-il.
La police locale a ouvert une enquête, mais en attendant ses conclusions, la peur s’installe dans la communauté. Les habitants de Gisaba réclament justice et appellent les autorités à renforcer la sécurité dans une zone déjà marquée par des épisodes de violence récurrents.
Cibitoke : une province sous tension permanente
À la frontière avec la République démocratique du Congo et le Rwanda, la province de Cibitoke reste l’une des plus sensibles du Burundi. Le nord-ouest du pays est régulièrement le théâtre d’incidents violents, attisés par la présence de groupes armés, les activités minières illégales et des tensions politiques ou communautaires latentes.
Plusieurs rapports indépendants ont documenté des abus imputés tant à des membres des forces de l’ordre qu’aux Imbonerakure, dont certains sont accusés d’agir en toute impunité. Dans ces zones rurales, les structures judiciaires peu efficaces et l’extrême pauvreté aggravent la vulnérabilité des habitants, nourrissant un sentiment croissant d’abandon face à l’insécurité.
Alors que la tension reste vive à Gisaba, l’assassinat de ces deux orpailleurs soulève de nouvelles interrogations sur les liens troubles entre politique locale, exploitation minière artisanale et violences ciblées dans cette région frontalière.
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Photo : Des orpailleurs en activité sur un site d’extraction d’or dans la province de Cibitoke, au nord-ouest du Burundi © SOS Médias Burundi