Est de la RDC : des civils et réfugiés burundais enrôlés chez les Wazalendo, une nouvelle source d’instabilité
SOS Médias Burundi
Alors que le Burundi affirme soutenir les efforts de stabilisation en RDC, des informations de terrain révèlent une réalité plus complexe. Derrière le déploiement officiel de troupes burundaises, des civils, réfugiés et anciens combattants burundais rejoignent en nombre les milices Wazalendo. Cette implication parallèle inquiète les acteurs locaux et fait craindre une escalade incontrôlable des violences dans la région des Grands Lacs.
Alors que le Burundi a officiellement déployé près de 10 000 soldats en soutien aux FARDC dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), un autre phénomène, plus discret mais tout aussi préoccupant, attire l’attention : l’enrôlement massif de civils burundais — y compris des réfugiés et d’anciens miliciens — dans les rangs des Wazalendo, une nébuleuse de groupes armés soutenus par Kinshasa.
Cette dynamique parallèle, particulièrement visible dans le territoire d’Uvira, fait craindre un regain de tensions dans la région des Grands Lacs, déjà marquée par des décennies de conflits.
De nombreux jeunes burundais abandonnent leurs occupations quotidiennes — agriculture, petit commerce, conduite de taxi-moto ou coiffure — pour rejoindre ces groupes armés. Attirés par la promesse d’un avenir plus stable et de revenus réguliers, ils s’enrôlent en masse.
« Nous espérons une vie meilleure. Après la guerre, le gouvernement congolais va nous payer comme des soldats », explique un jeune combattant rencontré à Kiliba.
Dans les quartiers de Kasenga, Kavimvira, Kilibula, Kawizi et Kiliba, les témoignages se multiplient. Des réfugiés installés dans les camps de Mulongwe, Lusenda et dans le centre de transit de Sange sont également aperçus parmi les Wazalendo, suscitant l’inquiétude des humanitaires.
Un agent de la Commission nationale pour les réfugiés (CNR), basé à Baraka, alerte sur une situation humanitaire critique :
« Les réfugiés n’ont reçu aucune aide depuis plus de cinq mois. Certains finissent par rejoindre les groupes armés. Mais ils n’en ont ni le droit, ni le devoir. »
Selon des sources sécuritaires régionales, le contingent burundais en RDC comprend non seulement environ 10 000 soldats de la Force de Défense Nationale du Burundi (FDNB), mais aussi des membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir, les Imbonerakure. Ces forces participent, depuis plus d’un an, à des opérations militaires conjointes contre les rebelles du M23 et d’autres groupes actifs dans le Sud-Kivu et le Nord-Kivu.
Des chercheurs et organisations locales tirent la sonnette d’alarme, évoquant le risque d’une nouvelle spirale de violences impliquant ces combattants étrangers.
« Le risque est grand que ces éléments étrangers soient impliqués dans des crimes, notamment des pillages et des assassinats », avertit un expert en sécurité régionale.
Face à cette complexité croissante, certains acteurs de la société civile insistent sur la nécessité de distinguer les « vrais Wazalendo » — considérés comme des résistants patriotes — des « faux Wazalendo », accusés d’exactions sous couvert de défendre la nation.
Pour l’heure, Kinshasa peine à contrôler les multiples factions armées qu’elle soutient, fermant les yeux sur les graves violations commises à l’encontre des civils. Une situation qui alimente l’instabilité et pourrait compromettre toute perspective de paix durable dans l’est de la RDC.
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Photo : Des Imbonerakure en parade militaire en marge de la célébration de la 8ème édition de la journée leur dédiée, le 31 août 2024 à Bujumbura. Ils sont parmi les groupes déployés chez les Wazalendo © SOS Médias Burundi
