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Burunga : lancement de la campagne du CNDD-FDD entre bilans flatteurs et scepticisme populaire

SOS Médias Burundi

Alors que le CNDD-FDD vante ses réalisations en matière de santé, d’infrastructures et de relance minière, de nombreux citoyens interrogés sur place remettent en question l’impact réel de ces promesses. Cette première étape de campagne à Burunga illustre le décalage persistant entre le discours officiel et les réalités du terrain.

Le CNDD-FDD a donné le coup d’envoi officiel de sa campagne électorale pour les législatives et les communales dans la province de Burunga (sud-est), ce vendredi 17 mai. Lors du rassemblement, le secrétaire général du parti au pouvoir, Révérien Ndikuriyo, a adopté un ton résolument ferme. « Le pays n’est pas un morceau de pain qu’on donne à un enfant qui pleure, il faut le mériter », a-t-il déclaré. Une phrase qui, pour certains, reflète un refus implicite d’accepter l’alternance politique, même en cas de revers électoral.

Ce lancement s’inscrit dans le calendrier électoral initié le 9 mai à Gitega, capitale politique du Burundi. Mais sur le terrain, une réalité saute aux yeux : dans presque toutes les provinces, seuls les candidats du CNDD-FDD sont visibles. Les autres partis politiques, y compris la coalition d’opposition Burundi bwa Bose, peinent à se faire entendre, freinés notamment par la grave pénurie de carburant qui paralyse le pays depuis plus de 52 mois.

Santé : des promesses officielles à l’épreuve du quotidien

Au cœur de son discours, Révérien Ndikuriyo a vanté plusieurs réalisations : gratuité des soins pour les femmes enceintes et les enfants, construction d’hôpitaux communaux, mise à disposition prochaine d’ambulances. Il a également souligné les efforts dans la lutte contre le paludisme, et salué les avancées liées à la Carte d’Assurance Maladie (CAM).

Mais sur le terrain, ces annonces sont largement contestées. De nombreux habitants dénoncent le manque d’équipements dans les hôpitaux, l’indisponibilité des médicaments et la nécessité, pour les patients, d’acheter à leurs frais des traitements coûteux dans des pharmacies privées. La CAM, autrefois accessible pour 3 000 francs, est aujourd’hui jugée hors de portée de nombreux citoyens, son coût pouvant grimper jusqu’à 50 000 francs.

Infrastructures et environnement : un bilan contrasté

Le parti au pouvoir met également en avant la construction de diverses infrastructures : écoles, marchés, et un stade en l’honneur de l’ancien président Pierre Nkurunziza, qualifié de « modèle national ». Pourtant, certains observateurs relativisent ces succès. Le stade, par exemple, est perçu comme un projet à usage quasi privé, sans réel impact sur la population locale.

Même réserve concernant le programme de reboisement « Ewe Burundi Urambaye », présenté par Ndikuriyo comme un succès national. D’après lui, toutes les collines du pays ont été reboisées. Une affirmation que des habitants de Makamba contestent, assurant n’avoir constaté aucun résultat tangible, malgré plus de dix ans d’existence du programme. Certains soupçonnent même des détournements de fonds.

Mines et énergie : les citoyens restent prudents

Autre promesse mise en avant par les autorités : la relance de plusieurs sites miniers et l’adoption de nouvelles lois censées réguler l’exploitation des ressources. Toutefois, dans la population, le scepticisme domine. Ces annonces sont perçues comme des répétitions sans suite concrète, n’apportant aucun changement notable aux conditions de vie.

Une campagne aux allures de plébiscite

Le président Évariste Ndayishimiye a lui aussi multiplié les messages à l’intention des électeurs. Il appelle à un vote massif en faveur du CNDD-FDD, allant jusqu’à affirmer que « même les opposants voteront pour le CNDD-FDD ». Selon lui, le pays est déjà sur la voie du développement : « Les maisons sont construites, maintenant il faut se tourner vers l’économie », a-t-il déclaré.

Des voix d’opposition étouffées

Face à cette démonstration de force, les partis d’opposition dénoncent une mise à l’écart systématique. Ils critiquent l’inexécution des promesses formulées par le CNDD-FDD depuis son arrivée au pouvoir, et fustigent une campagne marquée par une profonde inégalité dans l’accès aux ressources logistiques et médiatiques.

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Photo : Révérien Ndikuriyo, secrétaire général du CNDD-FDD, qui a dénigré l’opposition lors du meeting du 17 mai 2025 © SOS Médias Burundi