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Kakuma (Kenya) : près de 200 réfugiés burundais rapatriés par avion après plus d’une décennie d’exil

SOS Médias Burundi

Face à la dégradation des conditions de vie dans le camp de Kakuma, au Kenya, près de 200 réfugiés burundais ont été rapatriés par avion cette semaine. Si l’opération est présentée comme volontaire, plusieurs témoignages laissent entrevoir une réalité plus nuancée, entre choix contraint et espoirs déçus.

Près de 200 réfugiés burundais vivant dans le camp de Kakuma, au nord-ouest du Kenya, ont été rapatriés cette semaine vers leur pays d’origine après plus de dix ans d’exil. Cette opération de retour volontaire, coordonnée par le HCR en collaboration avec les gouvernements burundais et kényan, a été rendue possible grâce à deux vols affrétés au départ de l’aéroport de Lodwar.

Les départs ont eu lieu les mardi 13 et mercredi 14 mai. Selon les informations recueillies sur place, plus de 50 ménages ont pris part à ce rapatriement aérien, dans un contexte de précarité croissante au sein du camp.

La dégradation des conditions de vie pousse au départ

À Kakuma, camp qui abrite actuellement plus de 200 000 réfugiés, dont environ 25 000 Burundais, les conditions de vie sont devenues de plus en plus difficiles. La réduction drastique des rations alimentaires, l’insécurité persistante, ainsi que les tensions croissantes avec la population hôte ont conduit de nombreux réfugiés à envisager le retour, malgré les incertitudes qui planent sur leur avenir au Burundi.

« La ration a été réduite de plus de moitié. La sécurité laisse à désirer, et les habitants de la région ne nous considèrent plus comme les bienvenus », témoigne un père de famille rencontré à l’aéroport de Lodwar, quelques heures avant l’embarquement. Comme lui, plusieurs réfugiés affirment ne pas rentrer par véritable choix, mais contraints par les circonstances.
« Ne soyez pas surpris si demain, on se retrouve dans un autre pays pour redemander l’asile », confie un autre passager, visiblement résigné.

Entre volonté politique et retour sous contrainte

Le gouvernement burundais continue d’exhorter les exilés à rentrer pour « contribuer à la reconstruction du pays ». Si certains réfugiés affirment répondre à cet appel patriotique, d’autres restent sceptiques sur les garanties de sécurité et de stabilité à leur retour.

« Les raisons qui nous ont poussés à fuir ne sont pas toutes réglées. Nous rentrons à cause de la misère ici, pas parce que le Burundi a changé », déplore un ancien enseignant du camp.

Ces retours interviennent dans un contexte plus large de pressions accrues exercées sur les réfugiés dans plusieurs pays d’accueil. À Kakuma, les réductions budgétaires du Programme alimentaire mondial (PAM), les conflits intercommunautaires et le sentiment de marginalisation ont contribué à accélérer les départs.

Un exil toujours massif

Malgré ces opérations ponctuelles de rapatriement, l’exil burundais reste massif. À ce jour, plus de 257 000 Burundais vivent encore réfugiés, principalement en Tanzanie, au Rwanda, en République démocratique du Congo, en Ouganda et au Kenya. Le rythme des retours volontaires, en forte baisse depuis 2022, se poursuit toutefois de manière sporadique.

Le HCR insiste sur le caractère volontaire de tous les retours. Toutefois, plusieurs organisations de défense des droits des réfugiés appellent à une vigilance accrue quant aux conditions dans lesquelles ces rapatriements s’effectuent, notamment face aux pressions indirectes exercées dans les camps.

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Photo : Un rapatrié tient le drapeau burundais à la main avant de franchir la frontière © SOS Médias Burundi