Élections 2025 au Burundi : les médias privés préoccupés par les nouvelles règles du CNC

SOS Médias Burundi
Alors que la campagne électorale pour les législatives et les communales doit débuter dans les prochaines semaines, le Conseil National de la Communication (CNC) a publié un nouveau règlement encadrant la couverture médiatique. Destiné à promouvoir l’équité et le pluralisme, le texte suscite toutefois de vives inquiétudes dans les médias privés, qui dénoncent un dispositif trop contraignant.
Le Conseil National de la Communication (CNC) a publié, ce 13 mai, une décision réglementant la couverture médiatique de la campagne électorale pour les législatives et les communales prévues le 5 juin prochain. Ce texte, composé de 27 articles répartis en cinq chapitres, vise à garantir l’équité, le pluralisme et un accès équitable aux médias pour tous les candidats. Pourtant, dans les rédactions privées, ce nouveau cadre réglementaire suscite perplexité et inquiétude.
Selon l’article 3, tous les médias, qu’ils soient publics ou privés, sont autorisés à couvrir la campagne. Mais l’article suivant impose que cette couverture soit gratuite, une contrainte jugée intenable par de nombreux responsables de médias indépendants, déjà fragilisés par un contexte économique difficile.
Autre sujet de préoccupation : l’article 5 exige que les médias étrangers obtiennent une accréditation du CNC avant le lancement officiel de la campagne. Une mesure perçue comme une entrave à la liberté de la presse et un moyen de restreindre l’accès à l’information indépendante.
Dans les médias d’État, l’article 7 garantit un temps d’antenne égal à chaque candidat, selon les modalités fixées par le CNC, une fois la liste officielle publiée par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), comme le prévoit l’article 8. Mais le dispositif s’avère strict : tout retard de plus de dix minutes lors de l’enregistrement d’un message électoral entraînera la perte du créneau prévu, avertit l’article 16.
D’autres dispositions, comme l’interdiction de toute interruption publicitaire pendant la diffusion des messages de campagne (article 24) ou la restriction de la publication des résultats aux seules données validées par les autorités compétentes (article 25), ajoutent à la lourdeur du cadre réglementaire.
Signée par la présidente du CNC, Espérance Ndayizeye, cette décision se veut garante d’un traitement équilibré de l’information électorale. Mais pour de nombreux journalistes interrogés par SOS Médias Burundi, elle apparaît « rigide » et « dissuasive ».
« Nous n’avons pas les moyens techniques ni humains pour répondre à toutes ces exigences. Ce cadre semble taillé pour les grands médias publics, pas pour des rédactions réduites comme les nôtres », confie un responsable de radio communautaire basé à Bujumbura.
Dans un pays où l’accès à une information pluraliste demeure un défi, ces règles strictes inquiètent. Certains professionnels envisagent même de ne pas couvrir l’ensemble de la campagne, estimant ne pas avoir les ressources nécessaires pour se conformer aux nouvelles obligations.
À l’approche d’un scrutin crucial pour l’avenir politique du Burundi, la liberté d’informer et la diversité des voix médiatiques pourraient bien être compromises par un encadrement jugé trop contraignant par une partie du secteur.
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Photo : Interview entre confrères au Burundi © Jean Pierre Aimé Harerimana – SOS Médias Burundi

