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Journée du Travail : au Burundi, les promesses s’accumulent, les conditions stagnent

SOS Médias Burundi

Alors que les autorités mettent en avant les progrès réalisés dans la fonction publique, les syndicats, eux, dressent un tableau bien plus sombre à l’occasion de la Journée internationale du travail. La Confédération des syndicats du Burundi (COSYBU) alerte sur la précarité persistante des conditions de travail, notamment l’absence de protection en matière de santé et de sécurité pour la majorité des salariés, et appelle à des réformes urgentes et concrètes.

Comme chaque année, la célébration du 1er mai est l’occasion pour les syndicats de tirer la sonnette d’alarme. Cette fois encore, la COSYBU dénonce un système qui laisse de côté la grande majorité des travailleurs, particulièrement exposés dans les secteurs à risques comme le bâtiment, l’industrie, les transports ou encore le gardiennage.

« Des agents de sécurité montent la garde la nuit, parfois sans abri, sans équipement de protection, ni couverture médicale en cas d’agression ou de blessure », déplore un syndicaliste.

Selon la confédération, seuls quelques grands employeurs, comme la Brasserie et Limonaderie du Burundi (Brarudi) ou la Savonnerie, Huilerie et Raffinerie du Burundi (Savonor), proposent des services médicaux à leurs employés. Ailleurs, la situation reste critique. Nombre de travailleurs continuent d’évoluer dans des conditions insalubres, sans assurance maladie ni respect des droits élémentaires, tels que le repos hebdomadaire ou les contrats écrits. Dans les zones rurales, des ouvriers agricoles sont embauchés à la journée pour des salaires dérisoires, sans aucune protection légale.

À ces réalités s’ajoutent des pratiques abusives : journées de travail longues sans pauses suffisantes, exposition à des produits dangereux sans formation, licenciements injustifiés, et inflation galopante qui réduit chaque jour un peu plus le pouvoir d’achat des ménages.

Dans ce contexte, le président Évariste Ndayishimiye a tenu à transmettre un message d’espoir. Lors de son discours du 1er mai, il a salué les progrès réalisés dans le secteur public tout en reconnaissant qu’il restait « beaucoup à faire ». « Ce qui n’a pas été fait est sur la table », a-t-il déclaré, assurant que les réformes à venir tiendront compte des contraintes budgétaires du pays. Il a également insisté sur la nécessité d’un dialogue social renforcé entre employeurs et employés afin de stimuler la performance collective.

Mais du côté des syndicats, les promesses ne suffisent plus. « Le panier de la ménagère est vide et les salaires stagnent. Comment vivre dignement dans ces conditions ? », interroge un représentant de la COSYBU. Les responsables syndicaux regrettent l’absence d’une politique salariale claire, alors que l’inflation continue de peser lourdement sur les familles burundaises.

Le président Ndayishimiye a toutefois réitéré son engagement à bâtir un environnement de travail « sain, équitable et inclusif », appelant les citoyens à participer activement au développement du pays par une « autoévaluation collective ».

Symbole international de la lutte ouvrière, le 1er mai trouve son origine dans les grèves ouvrières de 1886 à Chicago, où les travailleurs réclamaient la journée de huit heures. En 1889, le Congrès socialiste de Paris en fit une journée internationale de revendication. Depuis, elle est devenue jour férié dans de nombreux pays, dont le Burundi, et demeure un marqueur fort de la solidarité et des luttes sociales.

Mais au Burundi, en 2025, cette date sera-t-elle le catalyseur de réformes profondes ou une commémoration de plus sur fond de stagnation ? L’avenir des travailleurs en dépend.

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Des salariés défilent en marge de la célébration de la journée dédiée aux travailleurs dans le sud-ouest du Burundi © DR