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Scandale de fraude aux examens à Rumonge : un directeur d’école en détention, soupçonné d’avoir bénéficié de protections politiques

SOS Médias Burundi

La fuite d’épreuves d’examen avant leur distribution officielle secoue la commune de Rumonge. Un directeur d’école est actuellement en détention, tandis que des soupçons de collusion politique viennent jeter le trouble sur l’enquête en cours. Ce scandale relance le débat sur l’intégrité des évaluations scolaires au Burundi.

Le directeur de l’école fondamentale de Mugara, située dans la commune de Rumonge, est en détention depuis une semaine au commissariat provincial. Il est accusé d’avoir facilité une fraude lors des récents examens organisés par la direction communale de l’Éducation.

Selon plusieurs sources concordantes, ce directeur aurait remis son téléphone personnel à une élève de 3ᵉ année fondamentale, inscrite dans un établissement situé au centre urbain de Rumonge (sud-ouest du Burundi). Le téléphone contenait des épreuves confidentielles qui auraient fuité avant leur distribution officielle. Des photos de ces examens, retrouvées dans les téléphones de plusieurs élèves, viennent appuyer ces soupçons.

Vague d’indignation chez les parents et enseignants

La révélation de cette affaire a suscité une vive indignation parmi les parents d’élèves et les enseignants de la région. « C’est choquant, surtout que ces examens sont censés être sécurisés par la direction communale. Comment peuvent-ils déjà circuler dans des téléphones ? », s’interroge un enseignant d’une école fondamentale locale.

Certains enseignants avancent que le directeur avait eu accès aux copies des épreuves lors de leur reproduction, et qu’il aurait profité de cette occasion pour les photographier avec son téléphone. Aucun communiqué officiel n’a toutefois annoncé, à ce jour, une annulation ou une reprise des examens concernés — un silence qui alimente l’incompréhension. « Il y a une complaisance inquiétante. Ce genre de tricherie remet en question la crédibilité de tout le système éducatif », déplore un parent rencontré lors de la proclamation des résultats du deuxième trimestre, ce vendredi.

Une fraude qui s’inscrit dans un phénomène plus large

L’affaire de Mugara ne serait pas un cas isolé. Plusieurs acteurs du secteur éducatif tirent la sonnette d’alarme sur la banalisation croissante de la tricherie dans les écoles publiques, notamment lors des examens nationaux et communaux. Certains enseignants affirment que les pressions exercées sur les directeurs d’établissement par leur hiérarchie ou par des responsables politiques locaux encouragent indirectement ces pratiques.

« Il arrive que certains responsables ferment les yeux sur des fuites d’examens ou favorisent certaines écoles pour améliorer les statistiques locales », confie un enseignant sous couvert d’anonymat. Cette quête de résultats, souvent motivée par des logiques politiques ou clientélistes, crée un terrain favorable à la fraude organisée.

Une affaire déjà politisée ?

À Rumonge, des rumeurs persistantes évoquent des manœuvres en coulisses pour obtenir la libération du directeur incriminé, connu pour sa proximité avec le parti au pouvoir, le CNDD-FDD. « Des cadres du parti interviennent pour étouffer l’affaire. On craint que l’enquête n’aille pas jusqu’au bout », confie un fonctionnaire local.

Ce contexte a poussé plusieurs associations de parents d’élèves à réclamer une intervention directe du ministère de l’Éducation nationale et de la Recherche scientifique. Leur exigence est claire : garantir une enquête indépendante et sans interférences politiques. « Cette affaire ne doit pas être étouffée. Il en va de la crédibilité de tout notre système éducatif », martèle le représentant d’une organisation éducative locale.

Une confiance fragilisée

Alors que les résultats du deuxième trimestre viennent d’être proclamés, la confiance des parents, des élèves et de nombreux enseignants est sérieusement entamée. La capacité des autorités éducatives à rétablir l’intégrité des examens au Burundi est désormais mise à l’épreuve.

L’avenir dira si le ministère saura tirer les leçons de cette affaire et restaurer la crédibilité d’un système éducatif aujourd’hui fragilisé par les soupçons de tricherie… et de protection politique.

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Photo : un homme dans une rue de Rumonge © SOS Médias Burundi