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Buhumuza : un militant pro-CNDD-FDD sème la terreur à l’approche des élections de 2025

SOS Médias Burundi

À quelques mois des élections législatives et communales prévues en 2025 au Burundi, des habitants de la région de Buhumuza (Est du pays) dénoncent les propos violents et les agissements d’un individu identifié comme Shabani Nimubona. Originaire de Muyinga, il est accusé de harcèlement politique, de discours de haine et d’intimidation contre toute personne ne partageant pas sa ligne partisane.

Buhumuza, 15 avril 2025 – L’inquiétude grandit au sein de la population de la future province de Buhumuza, qui regroupera les actuelles provinces de Muyinga, Cankuzo et Ruyigi. En cause : les agissements d’un militant zélé du CNDD-FDD, connu sous le nom de Shabani Nimubona. Décrit comme un personnage influent et craint dans la région, il est accusé de proférer régulièrement des menaces contre les membres d’autres partis politiques, dans un contexte pré-électoral tendu.

Lors de récentes descentes du parti présidentiel dans plusieurs communes du Buhumuza, cet homme s’est distingué par un langage violent et des discours d’exclusion à l’égard des non-membres du CNDD-FDD. « Ceux qui ne sont pas avec nous n’ont pas leur place dans ce pays », aurait-il déclaré publiquement, ajoutant que « tôt ou tard, ils seront contraints par la force de rejoindre le parti au pouvoir ».

Des sources proches du parti au niveau local affirment que Shabani Nimubona cherche à se faire remarquer par les hautes sphères du CNDD-FDD, quitte à adopter une posture extrémiste. Il est décrit comme imprévisible, intolérant, et méprisant envers quiconque s’oppose à ses idées – y compris certains cadres de son propre parti, qu’il accuse de mollesse dans la « chasse aux opposants ».

Un contexte marqué par l’historique des violences électorales

Les méthodes de Shabani Nimubona s’inscrivent dans un climat politique tendu, où les violences liées aux échéances électorales sont monnaie courante. Depuis plus de deux décennies, les périodes pré-électorales au Burundi sont régulièrement émaillées d’arrestations arbitraires, de disparitions forcées, de passages à tabac et d’intimidations ciblant les opposants, mais aussi parfois des membres du parti au pouvoir accusés de modération.

En 2020, plusieurs rapports d’organisations locales et internationales avaient documenté des exactions commises par les Imbonerakure, la ligue des jeunes du CNDD-FDD, qualifiée par l’ONU de milice au comportement paramilitaire. Ces violences touchaient surtout les membres du CNL (Congrès National pour la Liberté) et leurs sympathisants, notamment dans les provinces de Ngozi, Kirundo, Kayanza et Muyinga ,dans le nord-est.

Des Imbonerakure de Buhumuza dans une parade militaire, sous la supervision de Shabani Nimubona © SOS Médias Burundi

Le schéma semble se répéter à l’approche des élections de 2025, avec une mobilisation accrue des partisans radicaux, un usage de plus en plus agressif du discours patriotique, et la criminalisation de toute voix discordante.

Des antécédents inquiétants

Shabani Nimubona traîne un lourd passé. Des organisations burundaises l’ont déjà cité dans des rapports relatifs à des disparitions forcées et à des actes de torture commis dans sa province natale. Malgré cela, il continue à opérer librement et affirme ne craindre aucune conséquence pour ses actes.

Lors des récentes démonstrations de force à Cankuzo et Ruyigi, il s’en est également pris à certains jeunes Imbonerakure, les accusant de laxisme.

« Le pays ne se donne pas sur un plateau d’or. Il faut le conquérir militairement », aurait-il lancé, appelant les jeunes à combattre sans merci les supposés ennemis du CNDD-FDD, internes comme externes.

Une rhétorique anti-Rwanda virulente

Dans plusieurs de ses discours, Shabani Nimubona a désigné le Rwanda comme le principal ennemi du Burundi, l’accusant de conspirer avec des opposants internes pour renverser le pouvoir en place. Il soutient que Kigali chercherait à favoriser « une partie de la population » pour la remettre au pouvoir, une théorie jugée dangereuse et sans fondement par plusieurs observateurs locaux.

Une population terrorisée et en quête de protection

Face à cette escalade verbale et aux menaces, une partie de la population locale tire la sonnette d’alarme. Des citoyens de Muyinga, Cankuzo et Ruyigi interrogés par SOS Médias Burundi dénoncent une atmosphère de peur et d’intimidation, et appellent les autorités administratives et les responsables du CNDD-FDD à mettre fin aux agissements de Nimubona.

« L’adhésion à un parti politique est un droit, pas une obligation », rappelle un habitant de Ruyigi, qui préfère garder l’anonymat. D’autres redoutent que ces incitations à la violence ne débouchent sur des actes irréparables dans le contexte sensible des élections.

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Photo : Shabani Nimubona dans une séance de mobilisation des Imbonerakure, les membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD, le parti au pouvoir au Burundi © SOS Médias Burundi