Nduta (Tanzanie) : plusieurs arrestations aux allures d’enlèvements inquiètent des réfugiés

SOS Médias Burundi
Une dizaine de réfugiés burundais ont été arrêtés en moins de deux semaines au camp de Nduta. Aucun motif n’est communiqué. Les réfugiés s’inquiètent et lancent un cri d’alarme.
Nduta, 9 avril 2025- Le camp de réfugiés de Nduta, en Tanzanie, est actuellement en proie à une vague d’arrestations qui suscitent de vives inquiétudes parmi la population. Selon les informations recueillies auprès de leaders communautaires, au moins onze réfugiés, dont trois femmes et plusieurs jeunes hommes, ont été arrêtés en l’espace de deux semaines, sans qu’aucune explication ne leur soit fournie. Ces arrestations ont eu lieu dans plusieurs zones du camp, notamment les zones 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14, et 17.
Les faits se sont déroulés principalement lors des journées de mardi, mercredi et jeudi de la semaine dernière, ainsi que mardi de cette semaine. Par exemple, Nestor Manirakiza, de la zone 5, et Melchior, de la zone 12, font partie des réfugiés arrêtés. D’autres, comme Ismael et Diomède, viennent des zones 8 et 17. Cependant, les autorités locales peinent à donner un nombre exact, car les arrestations semblent se multiplier chaque jour.
Des arrestations sans motif clair
Les réfugiés sont alarmés par l’absence de toute information concernant ces interpellations. Une grande partie de ces arrestations a eu lieu lors d’événements quotidiens tels que la distribution des vivres du mois d’avril. Un autre réfugié a été arrêté chez lui, dans un village où vivent des personnes nécessitant une protection particulière. Selon les témoignages recueillis, ces arrestations sont souvent menées par des policiers qui arrivent en pick-up, munis de listes de noms, et accompagnés par des individus qui restent anonymes.
« Nous craignons le pire. Certains sont détenus à la prison de Kibondo, mais pour d’autres, nous ne savons même pas où ils sont », affirment des réfugiés. Ces arrestations sont perçues comme des disparitions forcées, et plusieurs familles n’ont plus de nouvelles de leurs proches.
Des abus répétés contre les réfugiés burundais
Les abus envers les réfugiés burundais en Tanzanie sont malheureusement loin d’être un phénomène isolé. Depuis plusieurs années, les réfugiés sont confrontés à des conditions de vie difficiles et à des violations systématiques de leurs droits humains. Des rapports d’ONG et d’organisations internationales font état d’arrestations arbitraires, de détentions prolongées sans jugement, ainsi que de violences physiques et psychologiques infligées par des agents de sécurité et des autorités tanzaniennes.
Les autorités tanzaniennes, en collaboration avec les forces de sécurité locales, sont souvent accusées de mener des opérations d’intimidation et de harcèlement contre les réfugiés burundais. Ces actions sont souvent justifiées par des raisons de « sécurité nationale », mais elles sont perçues comme des violations flagrantes des droits fondamentaux des réfugiés.
En outre, les réfugiés sont régulièrement confrontés à des abus physiques, des extorsions et des menaces de violence. Les témoignages recueillis au camp de Nduta révèlent que certains réfugiés ont été battus et détenus sans raison valable, simplement en raison de leur origine ethnique ou de leurs liens politiques présumés avec l’opposition armée burundaise.
Des spéculations sur les motifs des arrestations
Les raisons de ces arrestations restent floues, mais certains réfugiés avancent plusieurs hypothèses. Parmi les explications possibles, on évoque une enquête sur un vol à main armée qui aurait eu lieu dans le camp fin mars, des affaires liées à l’échange de faux billets de banque, ou encore des motifs politiques. Ces théories alimentent la peur croissante au sein de la communauté, d’autant plus que la sécurité semble se détériorer rapidement.
Un employé d’une ONG humanitaire opérant dans le camp a partagé son inquiétude : « Je ne me sens plus en sécurité ici. J’ai changé mes habitudes et mes routines quotidiennes, je ne réponds plus aux appels inconnus et je suis constamment sur mes gardes. » Un autre réfugié ajoute : « La situation est presque devenue une insécurité totale, et les activités habituelles du camp, comme les bistrots ou les rencontres, sont paralysées. Les gens ont peur. »
Un appel à la communauté internationale et aux autorités compétentes
Face à cette situation de plus en plus préoccupante, les familles des réfugiés arrêtés exigent des réponses. Elles demandent à la police de fournir des informations sur l’emplacement de leurs proches, tout en appelant le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) à renforcer la protection dans le camp.
Les réfugiés se tournent également vers la communauté internationale, appelant à une pression accrue sur les autorités tanzaniennes pour qu’elles cessent les abus et les intimidations, et pour qu’elles respectent les engagements pris en matière de protection des réfugiés.
Nduta, qui abrite plus de 58 000 réfugiés burundais, est un lieu où les conditions de vie sont déjà difficiles, et cette nouvelle escalade d’arrestations fait craindre une détérioration rapide de la situation sécuritaire.
Les autorités tanzaniennes et le HCR sont désormais appelés à prendre des mesures urgentes pour clarifier cette situation et garantir la sécurité des réfugiés qui vivent dans une incertitude grandissante.
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Photo : un réfugié burundais devant sa maison à Nduta © SOS Médias Burundi