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Cibitoke : deux orpailleurs tués lors d’un entraînement militaire des Imbonerakure

Deux orpailleurs ont perdu la vie et trois autres ont été grièvement blessés lors d’un entraînement militaire mené par les Imbonerakure, la ligue des jeunes du parti au pouvoir. L’incident, survenu dans l’après-midi du mardi 25 mars à Cishemere, relance les inquiétudes sur la militarisation de cette jeunesse et les risques pour la population civile. (INFO SOS Médias Burundi)

Selon des témoins, les jeunes Imbonerakure participaient à des exercices militaires encadrés par des éléments de la Force de défense nationale du Burundi (FDNB) et des combattants des Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR). Les tirs d’armes lourdes et légères ont semé la panique dans la population environnante.

Les orpailleurs travaillaient sur un site aurifère situé à proximité du champ de tir de Cishemere, à moins de trois kilomètres du centre de Cibitoke ( nord-ouest du Burundi). Des balles perdues et des éclats d’obus ont mortellement touché deux mineurs artisanaux, tandis que trois autres ont été blessés et évacués vers un hôpital local.

Les Imbonerakure, une milice selon l’ONU

Les Imbonerakure, souvent présentés comme un simple mouvement de jeunesse du CNDD-FDD, le parti au pouvoir, sont qualifiés par les Nations Unies de milice impliquée dans des exactions contre les opposants au régime de Gitega. Depuis plusieurs années, ils sont cités dans de nombreux actes de répression, d’intimidations et d’agressions visant des dissidents politiques, des journalistes et des membres de la société civile.

Des rapports d’organisations internationales indiquent également qu’ils seraient engagés aux côtés des forces burundaises en République Démocratique du Congo (RDC). Ils accompagneraient la FDNB dans des opérations militaires aux côtés des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et de leurs milices alliées, dans le cadre du conflit contre les rebelles du M23.

Les autorités burundaises et les représentants du CNDD-FDD, ancienne rébellion hutu au pouvoir depuis 2005, rejettent systématiquement ces accusations. Ils dénoncent des « mensonges » visant à « ternir l’image des Imbonerakure, du pays et de ses institutions ».

Des exercices militaires controversés

Ces entraînements militaires suscitent des craintes parmi les habitants, qui dénoncent la proximité des séances de tirs avec des zones habitées et des lieux de travail. Selon une source sécuritaire locale, ces formations prépareraient des jeunes Burundais à un possible déploiement aux côtés des FARDC dans leur lutte contre la rébellion du M23 en République Démocratique du Congo.

Le commandant du 112ᵉ bataillon du camp de Cibitoke a confirmé les décès, tout en qualifiant l’incident d’ »isolé ». Il affirme que des mesures de prévention sont régulièrement prises pour éviter la présence de civils aux abords du champ de tir. Cependant, il a nié toute implication des Imbonerakure dans ces exercices, malgré les témoignages concordants et les déclarations de certains jeunes ayant participé aux manœuvres.

Un lourd bilan en six mois

L’incident de Cishemere s’ajoute à une série d’accidents mortels liés aux entraînements militaires dans la région. Au cours des six derniers mois, huit personnes, dont six enfants, ont trouvé la mort après avoir été touchées par des projectiles ou des engins explosifs non désamorcés.

Les habitants, inquiets pour leur sécurité, réclament l’arrêt immédiat de ces entraînements à proximité des habitations, des zones de travail et du site de transit des réfugiés congolais. Ils demandent également une enquête indépendante pour établir les responsabilités et éviter de nouvelles pertes humaines.

Face à cette situation, la société civile et les défenseurs des droits humains interpellent les autorités sur la militarisation croissante des Imbonerakure et les dangers que cela représente pour la stabilité du pays et la protection des civils.

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Photo : des Imbonerakure en parade militaire à Cibitoke © SOS Médias Burundi