Guerre dans l’Est du Congo : le Rwanda veut des engagements sur sa sécurité avant de se soucier de la question congolaise

Le sommet sur la crise dans l’est du Congo qui était prévu ce dimanche entre les présidents congolais et rwandais sous la médiation du chef de l’État angolais, a été reporté sine die. La présidente congolaise a accusé dimanche le Rwanda d’avoir torpillé le processus de paix par une nouvelle condition. Le gouvernement rwandais parle du refus de la RDC à s’engager en faveur de pourparlers directs avec le M23, le principal groupe rebelle qui contrôle plusieurs zones de la province du Nord-Kivu à l’est du Congo. Mais le Rwanda pose aussi une autre condition et pas des moindres : la mise en place des mesures sérieuses pour éradiquer les FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda), une force résiduelle réduite au banditisme…,selon le président congolais Félix Tshisekedi. (SOS Médias Burundi)
L’annulation de ce sommet a été annoncée par la présidence angolaise.
« Contrairement à ce à quoi nous nous attendions, le sommet n’aura plus lieu aujourd’hui », a confirmé dimanche, le responsable-médias de la présidence angolaise, Mario Jorge. Paul Kagame du Rwanda et Félix Tshisekedi de la RDC (République démocratique du Congo) devaient se rencontrer dans la capitale de l’Angola, Luanda pour parler de nouveau de la crise sécuritaire qui sévit dans l’est du vaste pays de l’Afrique centrale. C’est João Lourenço, président angolais qui joue l’arbitrage, comme médiateur désigné de l’Union africaine. Ce dernier avait déclaré avoir « bon espoir que cette réunion aboutisse à la décision de signer prochainement un accord de paix durable entre les deux pays voisins ».
La réunion des ministres qui a tout chamboulé
Tout commence samedi avec la réunion des patrons de la diplomatie rwandaise et congolaise. Dans un communiqué, le ministère rwandais en charge de la coopération internationale a expliqué les raisons du report du sommet de Luanda parlant de « non résolution des points critiques ».
Selon ce document, le Rwanda et la RDC ne sont pas parvenus à un consensus sur un engagement « en faveur de pourparlers directs avec le groupe rebelle congolais M23 », en vue d’une solution politique au confit qui sévit dans l’est de la RDC.
« Ce sommet n’aurait donc pas abouti à un accord, en particulier dans le contexte des menaces permanentes des dirigeants de la RDC, y compris le Président, de procéder à un changement de régime au Rwanda, ainsi que la coalition plus large des forces déployées dans l’est de la RDC aux côtés des FARDC (Forces Armées de la République démocratique du Congo), y compris les mercenaires européens, l’armée burundaise, les Wazalendo (nom attribué aux milices locales entretenues par les autorités congolaises) ,et les FDRL », peut-on lire dans ce communiqué qui insiste que « des mesures sérieuses doivent être prises pour faire face aux FDRL, au-delà des stratégies utilisées pour contourner le problème ».

Selon le Rwanda, un report du sommet laisse du temps pour le dialogue proposé par le président de l’Angola, João Lourenço, avec l’ancien président du Kenya Uhuru Kenyatta, entre le M23 et la RDC.
« Il y a des actions que la RDC peut et doit prendre pour elle-même sans utiliser en permanence le Rwanda comme prétexte pour ne rien faire », dit le document qui conclut que « le Rwanda reste prêt à participer à un sommet qui adopterait une voie sérieuse et concrète pour résoudre ces questions en suspens une fois pour toutes ».
Ce dimanche, la RDC a accusé le Rwanda d’avoir torpillé le processus de paix.
« Ceci constitue un blocage délibéré et une entrave majeure aux efforts fournis pour faire aboutir le processus de Luanda…depuis juillet 2022 », a déclaré la présidence congolaise dans un communiqué.
Et de regretter : « en introduisant cette condition de dernière minute, contraire aux discussions précédentes, le Rwanda démontre une fois de plus son soutien inconditionnel au M23, un groupe terroriste impliqué dans des violations graves des droits humains et dans des activités déstabilisatrices en RDC ».
Selon les autorités congolaises, cette posture met en péril la paix et compromet les avancées majeures enregistrées notamment la signature d’un plan opérationnel permettant d’une part le retrait des forces rwandaises du territoire congolais et d’autre part, le désarmement et la neutralisation des FDRL.
S’adressant à la nation en tenue militaire le 14 décembre, Corneille Nangaa, président de L’Alliance Fleuve Congo (AFC) à laquelle le M23 est affilié, avait annoncé que « le processus de Luanda ne nous concerne pas et les résolutions devant en découler ne nous engagent pas ».

Le M23 est une ancienne rébellion Tutsi qui a repris les armes fin 2021, reprochant aux autorités congolaises de n’avoir pas respecté leurs engagements sur la réinsertion de ses combattants. Les autorités congolaises restent persuadées qu’il bénéficie d’un soutien du Rwanda, ce que le gouvernement rwandais ne cesse de balayer d’un revers de la main. De son côté, le gouvernement rwandais reproche à la RDC de collaborer avec les génocidaires Hutus-FDLR. Mais le président Félix Tshisekedi a estimé, à maintes reprises que « les FDLR est une force résiduelle réduite au banditisme ne représentant plus aucun danger pour le Rwanda ».
Félix Tshisekedi qui est arrivé à Luanda à la mi-journée dimanche, s’est entretenu avec son homologue angolais et l’ancien président kényan, Uhuru Kenyatta, a annoncé la présidence congolaise.
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Photo : les présidents congolais et angolais et l’ancien président kényan à Luanda, le 15 décembre 2024, crédit photo : compte X (Anciennement Twitter) de la présidence congolaise