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Crise-carburant : des centaines d’élèves n’ont pas pu aller à l’école suite à la grève des transporteurs sanctionnés par le gouvernement qui n’arrive pas à leur donner du carburant

Plusieurs centaines d’élèves qui fréquentent les écoles à régime d’internat n’ont pas pu se rendre à leurs établissements pour la rentrée prévue ce 16 septembre. Pour cause, les transporteurs à Bujumbura dans la ville commerciale, Rumonge (sud-ouest) et Muyinga (nord-est) notamment sont en grève. Cela fait suite à une note du ministre en charge des affaires intérieures qui leur interdit de fixer le prix du ticket au delà des tarifs officiels. Ce que les transporteurs rechignent à accepter car ils n’ont pas de carburant, affirment-ils. (SOS Médias Burundi)

Ce dimanche, plusieurs centaines d’élèves à destination des provinces du centre, centre-est, nord et nord-est, sud-est et sud-ouest et de l’est du Burundi, n’ont pas pu avoir un bus pour les y emmener.

« Nous sommes ici depuis 6h du matin. Tous les bus sont garés. Nous devons retourner à la maison mais malheureusement, nous ne sommes pas rassurés d’avoir un bus même ce lundi », ont témoigné des jeunes élèves, affamés. Ils avaient des sacs à dos remplis des effets personnels et des bagages à main. SOS Médias Burundi a rencontré ces élèves vers 16h 30.

Quelques personnes qui se trouvaient au parking principal dit Cotebu dans le nord de la capitale économique Bujumbura où se trouve le parking de ces bus et des agences de transport en commun parlent de « désolation ».

Dans l’avant-midi, des autorités administrative et policière s’étaient rendues à ce parking principal du nord de Bujumbura pour « faire un constat ». Mais aucune solution n’a été trouvée.

Motif de la grève

La grève est consécutive à une note du ministre en charge des affaires intérieures et de la sécurité, Martin Niteretse. Le vendredi 13 septembre, M. Niteretse a sorti une circulaire pour enjoindre aux représentants de l’administration et de la police de s’assurer que « les transporteurs appliquent les tarifs officiels ».

Une élève se lève pour répondre à une question d’un enseignant dans une classe au Burundi, les élèves sont très affectés par le manque de bus lié à la carence de carburant © SOS Médias Burundi

Pour le ministre burundais en charge des affaires intérieures et de la sécurité, plusieurs lamentations de passagers obligés de payer des prix démesurés, sont parvenues au gouvernement ces derniers temps.

Aussitôt la note de Martin Niteretse communiquée à ses lieutenants, la chasse aux transporteurs qui fixent le prix au dessus des tarifs officiels, a commencé. Sur tous les axes menant dans les différentes provinces du Burundi en provenance de Bujumbura, le contrôle routier avait été renforcé ce week-end. Selon des sources policières, plusieurs chauffeurs ont été sanctionnés à verser des amendes allant jusqu’à à 500 mille francs burundais et punis d’une durée de détention d’une semaine.

« Aujourd’hui, le gouvernement ne parvient plus à nous donner du carburant. Quand on en trouve sur le marché noir, on paie jusqu’à 45 mille francs le litre. Et on nous demande de respecter les tarifs officiels. C’est absurde », disent des chauffeurs. Le prix officiel d’un litre d’essence est de 4000, le diesel s’achète quant à lui, à 3925 francs burundais.

En plus de la détention du chauffeur, les véhicules doivent aussi être saisis, et dans certaines situations, les chauffeurs doivent comparaître devant un juge dans des affaires de flagrance. Ils peuvent être accusés de « perturbation de l’économie ou atteinte au bon fonctionnement de l’économie nationale ».

« Plusieurs propriétaires de véhicules qui assurent le transport en commun ont préféré les garder à la maison pour être à l’abri de ces sanctions ».

Ces derniers mois, beaucoup de particuliers et chauffeurs des véhicules des services de l’Etat dont l’armée et la police sans oublier ceux des camions réservés au transport des marchandises, se sont lancés dans le transport en commun pour « aider des passagers désespérés ».

Dans la majorité des cas, les passagers sont entassés dans des capots baptisés « places-VIP » ironiquement. Un salarié de la fonction publique qui fait ce genre de commerce a confié à SOS Médias Burundi qu’il taxe entre 2000 et 3000 francs, les gens qu’il prend dans le centre-ville de Bujumbura, selon qu’ils ont trouvé une place dans le capot ou pas. Entre le parking central de la ville commerciale et son quartier, il y a, à peu près 5 kilomètres, une distance facturée à 600 francs burundais officiellement, en bus introuvable aujourd’hui.

« Je compare la mesure du ministre à celui qui te passe à tabac mais t’empêche en même temps de pleurer », a-t-il analysé quand il a lu la circulaire du ministre Niteretse qui appelle aussi les passagers à « refuser de payer des prix excessifs » et à « dénoncer les transporteurs spéculateurs ».

Des passagers qui se sont confiés à SOS Médias Burundi demandent aux autorités burundaises de « trouver du carburant » au lieu de « chercher des boucs émissaires ».

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Photo : des passagers sur un parking où il y a un seul bus en service au centre de Bubanza, ouest du Burundi, le 15 septembre 2024 © SOS Médias Burundi