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Cankuzo-Ruyigi : l’accès aux services publics conditionné par le paiement des cotisations forcées du CNDD-FDD

Les contributions forcées qui ont été décidées par le parti présidentiel en vue de financer sa campagne électorale pour les législatives de 2025, n’ont pas épargné les provinces de Cankuzo et Ruyigi plus à l’est du Burundi. L’accès aux marchés et robinets publics notamment, est conditionné par le versement de ces cotisations. Des habitants dénoncent « un monopartisme de fait » leur imposé par CNDD-FDD qui se comporte comme « un parti-État ». (SOS Médias Burundi)

Par exemple, le mardi 27 août dernier, personne (commerçants et acheteurs) ne pouvait accéder au marché de Kabuyenge sans présenter une quittance de payement de ces cotisations jugées « forcées » par les habitants, y compris ceux qui militent pour l’ancienne rébellion Hutu. Le marché dont il est question, est situé non loin de la frontière avec la Tanzanie . Il est installé en commune de Gisuru dans la province de Ruyigi. Dans la région, plusieurs habitants ont été empêchés de puiser de l’eau sur des robinets publics et contraints de regagner leur domicile pour aller trouver de l’argent à verser aux administratifs et Imbonerakure (membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD), en charge de la collecte de ces contributions.

Toujours à Ruyigi en commune de Bweru, chaque citoyen de gré ou de force a dû payer un montant variant entre 1000 à 2000 francs burundais pour financer la campagne du CNDD-FDD comptant pour les législatives de l’an prochain.

« Chaque chef de service a donné une somme de 10 mille francs. Toute personne qui ne s’est pas acquittée des montants exigés reste toujours marginalisée et stigmatisée. Elle subit des menaces », disent des habitants.

« Il faut surveiller ces individus de près. Ce sont des « Ibipinga » ou encore opposants », des Imbonerakure ne cessent de proférer des menaces à l’endroit dès récalcitrants aux contributions forcées du CNDD-FDD, selon des témoins et victimes de la pratique à Bweru.

La semaine dernière, le marché de Rusengo situé dans la commune de Ruyigi (même province) ,a aussi été visité par les Imbonerakure.

« Les Imbonerakure ont exigé à tous les propriétaires d’échoppes de donner des contributions selon la taille du commerce. Tout le monde a dû payer moyennant un reçu. À les voir, on dirait des chasseurs à la recherche du gibier », indiquent des habitants qui se trouvaient au marché de Rusengo.

En province voisine de Cankuzo, SOS Médias Burundi s’est entretenu avec des résidents du chef-lieu de province. Ils affirment que chaque ménage a été contraint de donner un montant compris entre 5 mille et 10 mille francs burundais.

« Les fonctionnaires ont été obligés de verser l’équivalent de la totalité de leur salaire mensuel », déplorent des chefs de ménages.

Les personnes qui se sont confiées à SOS Médias Burundi au chef-lieu de Cankuzo parlent de cotisations qui « étouffent » une population « déjà misérable ».

« Nous sommes déçus et fatigués par le monopartisme de fait qui nous a été imposé par le CNDD-FDD qui se comporte comme un parti-État », se lamentent des habitants de Cankuzo.

Officiellement, ces cotisations sont volontaires. Elles devaient être perçues entre le 18 et le 29 août dernier, selon une circulaire du secrétaire général du CNDD-FDD, Révérien Ndikuriyo vue par SOS Médias Burundi.

Mais dans les différentes provinces du Burundi, la collecte se poursuit, s’accompagnant souvent des abus à l’endroit de toutes les personnes qui rechignent à contribuer.

Le parti FRODEBU a récemment demandé à ses militants de « résister à ces contributions ». Dans un communiqué de presse du 28 août dernier, son vice-président Phénias Niyigaba a dénoncé « des cotisations qui violent les lois burundaises et les droits des citoyens burundais », appelant les ministères en charge de la justice et des affaires intérieures à « agir ».

« Entretenir le laisser-aller et l’injustice dans un pays peut produire l’irréparable ».

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Photo : un rassemblement des militants du CNDD-FDD dans la ville commerciale Bujumbura, le 31 août 2024 © SOS Médias Burundi