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ECLAIRAGE – « Des gens veulent profiter de la méconnaissance des exigences de l’industrie minière »

La découverte à Murehe d’un filon, autrefois exploité par les Belges puis rebouché et « bétonné » à leur départ pour « le cacher aux Burundais », a été annoncée avec grand tapage. Des recettes faramineuses issues de son exploitation ont été promises. Afin de rester fidèles à notre devoir de journalistes et de conserver une perspective froide et objective, nous avons sollicité l’analyse d’un ingénieur des mines d’origine allemande ayant longtemps travaillé au Burundi. Pour aller au-delà du battage médiatique et éclairer cette prétendue découverte, ce spécialiste nous apporte un regard critique. À sa demande, nous ne dévoilons pas son nom.

Par Antoine Kaburahe

Une petite présentation ?

Je suis Allemand, ingénieur des mines, et j’ai longtemps travaillé en Afrique et même dans votre pays, le Burundi. Un pays que j’aime beaucoup et je continue à suivre ce qui s’y passe.

Avez-vous été étonné ou surpris par l’annonce d’un filon important à Murehe ?

Avant d’aller plus loin, je voudrais faire un distinguo important : il y a un discours politique et un discours scientifique. Je vais m’en tenir à la science, à ce qui se fait dans le domaine des mines, ma spécialité. Pour revenir sur cette annonce, non, je n’ai pas été étonné ! Je connais bien votre pays, ainsi que la région de Murehe, comme d’autres régions du Burundi telles que Kabarore, Kabuye, Ntega, etc. Ce sont des régions bien connues pour leur potentiel en minéralisations de coltan et de cassitérite. Je dis bien « potentiel ». D’ailleurs, ces régions ont fait l’objet d’exploitations minières durant l’époque coloniale par MINETAIN et sont encore exploitées artisanalement depuis des années.

Ce n’est donc pas une nouvelle sensationnelle, selon vous ?

Non.

En tant qu’ingénieur des mines, quand peut-on annoncer, de manière justifiée, avoir trouvé un filon riche ?

Bonne question. Définissons un peu les termes : un filon peut être mesuré en centimètres ou même en mètres. Ici, on ne parle pas encore de gisement. Pour qu’il y ait un gisement, il faut un programme de recherche faisant appel à toutes les techniques géologiques, géochimiques, géophysiques et autres, suivi d’un calcul de réserves et de teneurs dans les trois dimensions avec une étude de faisabilité.

Mais qu’est-ce qui garantit toutes ces études ?

Les réserves et les teneurs doivent être certifiées par les services géologiques du pays. Au Burundi, vous avez l’OBM. Mais ce n’est pas tout. Il existe des institutions internationales agréées. Nous sommes bien loin de cela avec ce qui a été dit dans les médias à propos du filon de Murehe.

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