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Bujumbura : le manque de carburant ira-t-il jusqu’à faire éclater des ménages?

La pénurie de carburant dans la ville de Bujumbura affecte beaucoup l’économie des foyers et les femmes en souffrent. Des mésententes surgissent en famille à cause de cette situation.Certains hommes accusent leurs épouses de mauvaise gestion. (SOS Médias Burundi)

Sylvane travaille en ville mais comme elle estime que son salaire est trop bas, elle doit demander les frais de déplacement à son conjoint.

Elle indique qu’elle ne peut pas abandonner ce travail, car même si son salaire est maigre, elle a d’autres avantages de service comme des cotisations pour les soins de santé à la Mutuelle de la fonction publique (MFP) et pour la retraite à l’INSS, l’Institut national de sécurité sociale.

Le problème aujourd’hui est que les frais de déplacement ne sont pas stables à cause de la carence de carburant.

Elle peut venir au travail avec un bus au prix normal de 600 francs burundais et rentrer à la maison avec un taxi de 5000 à 7000 francs.

Elle se retrouve ainsi contrainte de payer son déplacement avec les frais destinés à d’autres charges du ménage, d’où des mésententes avec son époux.

Carine aussi se lamente.

« Je ne peux pas abandonner mon travail même si mon revenu mensuel couvre seulement le transport pour aller au travail. Mais mon mari commence à me dire de rester à la maison car je ne rapporte rien ».

Une femme tenant un enfant dans ses bras sur le parking sans bus desservant le nord de la capitale économique Bujumbura avec des centaines d’autres passagers, le 9 juillet 2024 © SOS Médias Burundi

Scolastique qui élève seule ses trois enfants dit ne pas savoir comment s’en sortir.

« Faudra-t-il une contestation populaire pour que nos dirigeants comprennent ce que nous endurons? » s’interroge-t-elle avec colère.

Le même sentiment de révolte est affiché par des femmes rencontrées sur la file d’attente des bus de transport vers les quartiers du nord de Bujumbura.

Toutes ces femmes convergent sur l’idée que suite au manque de carburant, elles sont très déstabilisées dans la gestion des maigres fonds alloués aux dépenses du ménage, ce qui crée des tentions au sein du couple.

« C’est une situation très difficile qui touche les familles », signale Stéphanie.

« Qui dira que nous sommes en train de vivre au-dessus de nos moyens! On est obligé de payer un taxi à des prix exorbitants pour rentrer, alors que le salaire n’a pas bougé. Il y a aussi des quartiers périphériques, très éloignés du centre ville où on ne peut pas rentrer à pied tous les jours, alors qu’on ne peut pas non plus abandonner le travail », ajoute-t-elle.

Un analyste de la situation indique que le fait le plus inquiétant est qu’on ne voit pas comment cette crise pourra finir. Toutefois il avance une piste de solution.

« Peut-être que si le pays s’engageait sérieusement dans l’extraction des mines dormant dans son sous-sol et les revendait pour des rentrées de devises, les Burundais pourraient entrevoir enfin le bout du tunnel ».

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Photo : des centaines de passagers dont des femmes attendent un bus durant plusieurs heures, en vain, sur le parking desservant le nord de la ville commerciale Bujumbura, le 9 juillet 2024 © SOS Médias Burundi