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RDC – Ouganda : Kampala rouvre officiellement sa frontière avec les zones contrôlées par le M23

SOS Médias Burundi

Dans un geste aux implications régionales importantes, l’Ouganda a officiellement rouvert ce jeudi 10 juillet 2025 son poste-frontière de Bunagana, situé dans une zone de l’est de la République démocratique du Congo (RDC) actuellement sous le contrôle des rebelles du M23. Une décision que Kampala justifie par des considérations économiques, mais qui soulève des inquiétudes sur le plan géopolitique dans une région déjà marquée par de nombreuses tensions.

Depuis la prise de Bunagana par les rebelles du M23 en juin 2022, les échanges transfrontaliers entre l’Ouganda et l’est de la RDC se faisaient de manière informelle. Ce jeudi, une brève cérémonie officielle a été organisée du côté ougandais pour marquer la reprise formelle des activités commerciales sur cet axe. Plusieurs responsables locaux y ont pris part.

Interrogé sous anonymat, un haut responsable ougandais a expliqué : « Nous ne pouvons pas rester les bras croisés pendant que nos voisins profitent des opportunités commerciales qu’offre l’est de la RDC. Il est temps pour l’Ouganda de retrouver sa place sur ce marché vital. »

En effet, depuis l’expansion du M23 dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, le Rwanda a maintenu ses frontières ouvertes, capitalisant sur les flux commerciaux transfrontaliers. L’Ouganda, resté plus prudent, semble désormais décidé à rattraper ce retard.

Le Burundi, de son côté, n’a jamais fermé ses frontières avec les territoires contrôlés par des groupes armés dans l’est de la RDC, notamment dans la région du Sud-Kivu.

Le poste de Bunagana constitue un point stratégique tombé très tôt aux mains du M23, à la mi-juin 2022. Aujourd’hui, cette rébellion, affiliée à l’Alliance Fleuve Congo (AFC), contrôle de vastes zones dans les deux Kivu, y compris les chefs-lieux provinciaux et plusieurs zones minières cruciales.

Sur le plan militaire, l’Ouganda est présent en RDC dans le cadre d’une coopération avec les FARDC pour lutter contre les ADF (Forces démocratiques alliées), un groupe armé d’origine ougandaise classé organisation terroriste par les États-Unis. Le Burundi, quant à lui, a déployé environ 10 000 soldats dans l’est congolais pour appuyer l’armée nationale et les milices pro-gouvernementales dans leur combat contre le M23.

Le Mouvement du 23 mars, ou M23, est une ancienne rébellion à majorité tutsie qui a repris les armes fin 2021, accusant Kinshasa de ne pas avoir respecté les engagements liés à la réinsertion de ses combattants. Le gouvernement congolais accuse le Rwanda de soutenir activement ce groupe, notamment en lui fournissant hommes et équipements militaires. Kigali, de son côté, rejette catégoriquement ces accusations.

La réouverture officielle de la frontière de Bunagana par Kampala pourrait donc renforcer indirectement les capacités économiques du M23, tout en exacerbant les tensions diplomatiques entre la RDC, l’Ouganda et le Rwanda. Une évolution qui risque de rebattre les cartes dans la crise sécuritaire persistante dans les Grands Lacs.

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Photo : Au milieu, le président ougandais Yoweri Kaguta Museveni, lors d’une rencontre entre les chefs d’état-major des armées congolaise et ougandaise © SOS Médias Burundi