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Rumonge : des enseignants bénévoles bloquent les résultats scolaires pour réclamer trois mois d’arriérés

Un enseignant en pleine séance dans une salle de classe au Burundi.

SOS Médias Burundi

À l’issue de l’année scolaire 2024-2025, des dizaines d’élèves de la commune de Rumonge (sud-ouest du Burundi) attendent toujours leurs bulletins de fin d’année. En cause : plusieurs enseignants bénévoles refusent de remettre les résultats, protestant contre le non-paiement de leurs frais d’encouragement depuis trois mois.

Dans plusieurs écoles secondaires de la commune, l’atmosphère est tendue. Des enseignants recrutés localement sur base volontaire, et souvent rémunérés grâce à des contributions communautaires, ont décidé de bloquer la transmission des bulletins. Ils dénoncent l’accumulation d’arriérés qui, selon eux, traduit un mépris envers leur engagement.

« Nous avons travaillé toute l’année. Nous ne pouvons pas continuer à faire comme si de rien n’était. Nous réclamons nos trois mois impayés », témoigne l’un d’eux, sous couvert d’anonymat.

La Direction communale appelle à la patience

La Direction Communale de l’Enseignement (DCE) à Rumonge confirme le blocage. Un cadre de la direction assure que des démarches sont en cours pour recouvrer les fonds nécessaires, tout en appelant les enseignants au sens du devoir :

« Nous demandons que les résultats soient remis pendant que la commune cherche une solution. »

Mais à la mairie, le ton est moins conciliant. L’administrateur communal, Augustin Minani, critique vertement le système actuel de rémunération informelle par les parents. Il estime que cette pratique, bien qu’ancrée, favorise l’abandon scolaire.

« Si une famille a trois enfants et qu’on lui demande 10 000 francs burundais par enfant, elle peut être forcée de ne garder qu’un seul à l’école. Les deux autres abandonnent, faute de moyens », déplore-t-il.

L’administration avait pourtant promis, en début d’année scolaire, de s’attaquer à ce problème pour enrayer la déscolarisation croissante dans la commune.

Un malaise révélateur d’un système à bout de souffle

Au-delà du conflit actuel, la crise met en lumière les limites du système éducatif local. De nombreux établissements dépendent encore de cotisations collectées au niveau communautaire, parfois de manière opaque. Selon des sources locales, des soupçons de détournement des fonds récoltés au sein des écoles ont récemment poussé l’administration à suspendre la gestion locale de ces cotisations.

Cette mesure, bien qu’annoncée comme un gage de transparence, a plongé les enseignants bénévoles dans la précarité. Privés de revenus et sans statut officiel, ils se retrouvent seuls face à leurs revendications.

Pendant ce temps, les élèves concernés demeurent dans l’attente de leurs résultats. Une attente qui risque de compromettre leur inscription dans les niveaux supérieurs, faute de bulletins officiels.

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Photo : Un enseignant en pleine séance dans une salle de classe au Burundi. © Jean Pierre Aimé Harerimana / SOS Médias Burundi