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Sud-Kivu : des responsables congolais préfèrent résider à Bujumbura malgré leurs fonctions à Uvira

SOS Médias Burundi

Bujumbura, 26 juin 2025 — À Bujumbura, capitale économique du Burundi, il est courant de croiser des responsables congolais dans des hôtels, des maisons d’habitation ou encore des restaurants de la ville. Députés, ministres et cadres d’ONG — tous originaires de la province du Sud-Kivu en République démocratique du Congo — y séjournent régulièrement, tout en continuant d’exercer leurs fonctions à Uvira, de l’autre côté de la frontière.

Selon plusieurs sources locales, notamment des membres de la société civile et des commerçants transfrontaliers, ces responsables passent la journée à Uvira et rentrent chaque soir à Bujumbura.
« Vers 16h30, on les voit souvent revenir. Ce sont des députés, des fonctionnaires ou des membres d’ONG qui travaillent à Uvira mais dorment ici », témoigne un commerçant au poste frontalier de Gatumba.

Certains de ces responsables, installés à Bujumbura depuis février 2025, justifient cette situation par la persistance de l’insécurité dans l’est de la RDC.
« Nous continuons à travailler à Uvira, mais pour notre sécurité, nous dormons au Burundi », confient-ils sous couvert d’anonymat.

La société civile congolaise s’indigne

Cette tendance irrite profondément la société civile locale. Le 7 juin 2025, Mafikiri Mashimango, coordinateur de la Nouvelle Société civile congolaise à Uvira, a lancé un avertissement direct à ces élus.
« Nous voulons que nos députés viennent vivre ici, comme nous tous. Le vice-gouverneur Jean Jacques Elakano et le vice-maire Kifara Kapenda Kyky sont présents avec nous à Uvira. Pourquoi nos députés choisissent-ils de vivre à Bujumbura ? » a-t-il dénoncé lors d’une conférence de presse.

La société civile avait donné deux semaines aux députés provinciaux pour quitter Bujumbura et s’installer durablement à Uvira, faute de quoi des manifestations de protestation seront organisées.

Des ministres également pointés du doigt

Le phénomène ne se limite pas aux députés provinciaux. Plusieurs habitants rapportent que même lors de visites officielles à Uvira, certains ministres congolais — notamment celui de la Défense et celui des Droits humains — repartent dormir à Bujumbura.
« Ce n’est pas seulement les députés. Même les ministres qui viennent ici refusent de passer la nuit avec nous. Ils retournent toujours au Burundi », déplorent-ils.

Une fracture entre élus et populations

Pour la société civile, ce comportement remet sérieusement en cause l’engagement des dirigeants congolais envers les populations du Sud-Kivu.
Alors que les citoyens affrontent au quotidien l’insécurité, les violences et l’instabilité, leurs représentants choisissent l’exil temporaire à Bujumbura.

« Ce choix affaiblit la confiance entre élus et électeurs. Nous avons besoin de dirigeants qui partagent nos réalités et nos souffrances, pas de visiteurs de quelques heures », martèle un activiste d’Uvira.

Une proximité géographique stratégique

La ville commerciale de Bujumbura se trouve à quelques kilomètres d’Uvira, ce qui facilite ces déplacements quotidiens.
Même les éléments de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la Stabilisation en République Démocratique du Congo (Monusco), basés à Uvira, s’approvisionnent en grande partie à Bujumbura.

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Photo : la frontière de Gatumba, entre le Burundi et la RDC, régulièrement empruntée par des officiels congolais qui préfèrent passer la nuit dans la capitale économique burundaise, Bujumbura © SOS Médias Burundi