Rumonge : des réseaux de trafic d’enfants à l’œuvre sur les rives du lac Tanganyika
SOS Médias Burundi
Sur les rives du Tanganyika, un réseau de trafic d’enfants burundais inquiète de plus en plus les autorités locales. Dans les communes de Rumonge et de Nyanza-Lac, situées respectivement dans les provinces de Rumonge et de Makamba, des enfants âgés de 11 à 16 ans seraient régulièrement ciblés par des trafiquants qui leur promettent un avenir meilleur à l’étranger.
Selon des sources locales, ces réseaux bien organisés exploitent la précarité des familles pour recruter de jeunes victimes, parfois avec la complicité involontaire de membres des communautés.
Une plaque tournante du trafic d’enfants
La région de Rumonge est en passe de devenir un carrefour majeur pour les réseaux de traite d’êtres humains, notamment d’enfants. Les trafiquants opèrent dans l’ombre, profitant des lacunes en matière de surveillance et des difficultés économiques aiguës qui frappent les familles locales.
« Ils viennent dans les collines, ciblent les plus jeunes, surtout ceux issus de familles pauvres, et leur promettent des emplois bien rémunérés en Tanzanie, en Zambie ou en RDC », témoigne un responsable administratif de Nyanza-Lac ayant requis l’anonymat.
Une fois convaincus, les enfants sont emmenés clandestinement à travers des routes secondaires, loin des regards et des postes de contrôle. Les points de passage les plus couramment empruntés seraient ceux de Mugina (commune de Mabanda) et de Kabonga (Nyanza-Lac), deux zones frontalières avec la Tanzanie.
Des méthodes de recrutement bien rodées
Les trafiquants se présentent souvent sous des apparences trompeuses : recruteurs, bienfaiteurs, voire membres de la diaspora. Ils promettent une vie meilleure, des études ou un emploi lucratif. Dans certains cas, des villageois contribuent, sans mesurer la portée de leurs gestes, en hébergeant temporairement les enfants ou en facilitant leur départ.
Cette stratégie d’infiltration discrète et d’exploitation de la confiance communautaire rend la lutte contre ce trafic d’autant plus complexe.
L’appel à l’action des autorités locales
Face à l’ampleur du phénomène, directeurs d’écoles et administrateurs communaux appellent à un sursaut des autorités compétentes. La police de l’immigration et la brigade de protection des mineurs sont exhortées à renforcer leur présence dans les zones vulnérables.
« Il faut absolument renforcer les contrôles, sensibiliser les familles et les jeunes, et punir sévèrement les trafiquants », alerte un responsable scolaire de Rumonge.
Les autorités locales plaident également pour une mobilisation collective : familles, enseignants, leaders communautaires, tous sont appelés à faire preuve de vigilance et à signaler tout comportement suspect.
Une crise qui dépasse les frontières
Le cas du Burundi s’inscrit dans une tendance plus large à l’échelle de la région des Grands Lacs et de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC). Dans ces zones marquées par une pauvreté persistante, le trafic d’êtres humains — et particulièrement d’enfants — prend des proportions alarmantes. La misère en milieu rural, combinée à un manque d’opportunités, constitue un terreau fertile pour les réseaux de traite.
Cette alerte survient à l’approche de la Journée mondiale de la lutte contre la traite des êtres humains, célébrée le 30 juillet. Instaurée en 2013 par l’Assemblée générale des Nations Unies, cette journée vise à sensibiliser le public, protéger les victimes et intensifier la lutte contre ce crime transnational.
La coïncidence du calendrier souligne l’urgence de la situation : il est impératif d’agir pour protéger les enfants burundais et empêcher que le sud du pays ne devienne un point de départ permanent pour ces réseaux criminels.
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Photo : Des jeunes salariés sur un site de production de l’huile de palme à Rumonge, dans le sud-ouest du Burundi © SOS Médias Burundi
