Élections 2025 : un militant du CNL condamné à un an de prison pour destruction de carte d’électeur
SOS Médias Burundi
À trois semaines des élections législatives et communales prévues au Burundi, le climat politique devient de plus en plus électrique. Arrestations de militants de l’opposition, destructions de cartes d’électeurs et soupçons de fraudes alimentent les inquiétudes dans plusieurs régions, notamment dans les provinces de Rutana et Makamba, situées au sud-est du pays.
À Rutana, un jeune militant du Conseil National pour la Liberté (CNL), Gilbert Hatungimana, âgé de 22 ans, a été condamné jeudi à un an de prison ferme. Le tribunal de grande instance de la province l’a reconnu coupable d’avoir déchiré une carte d’électeur après s’en être emparé.
Les faits remontent au 12 mai sur la colline Kivoga, dans la zone Gitaba. D’après l’acte d’accusation, le jeune militant aurait intercepté un enfant en possession d’une carte d’électeur appartenant à sa mère. Il aurait alors arraché le document avant de le détruire. Jugé en procédure de flagrance, Gilbert Hatungimana a été reconnu coupable de destruction de document électoral – une infraction considérée comme grave en période préélectorale.
Cartes d’électeurs au cœur des tensions
Cet incident s’inscrit dans un contexte plus large de tensions croissantes liées à la gestion des cartes d’électeurs, particulièrement dans le sud du pays. En commune Nyanza-Lac, dans la province voisine de Makamba, plusieurs chefs de colline sont accusés d’avoir confisqué des cartes d’électeurs de travailleurs saisonniers pour les remettre aux permanences locales du CNDD-FDD, le parti au pouvoir. Des témoignages recueillis sur place évoquent même des tentatives de voter à la place des titulaires des cartes.
À ce jour, les autorités locales n’ont pas réagi publiquement à ces allégations. Toutefois, des membres de la société civile évoquent un « système organisé de manipulation électorale », mis en place au niveau communautaire pour fausser le processus.
Opposants visés par des arrestations ciblées ?
La récente arrestation de Siméon, un militant du parti Sahwanya-FRODEBU affilié à la coalition d’opposition Burundi bwa Bose, alimente également les tensions. Selon plusieurs sources locales, il aurait été interpellé dans un bar de la colline Kazirabageni après avoir simplement présenté sa carte d’électeur lors d’un échange verbal avec une militante du CNDD-FDD. Alertés, des membres des Imbonerakure, la ligue des jeunes du parti au pouvoir, auraient alors contacté les autorités locales, qui l’ont aussitôt arrêté. Il serait actuellement détenu au commissariat communal de Nyanza-Lac.
Multiplication des appels à un scrutin équitable
Face à ces dérives, les appels à un processus électoral juste et apaisé se multiplient, tant du côté de l’opposition que parmi les organisations de défense des droits humains. Beaucoup dénoncent l’instrumentalisation des institutions locales et des pratiques d’intimidation susceptibles d’éroder la confiance des électeurs dans le processus.
Un schéma qui se répète à chaque échéance électorale
Ce type d’abus n’est pas sans précédent au Burundi. Lors des élections générales de 2020, de nombreux militants de l’opposition avaient été arrêtés sans mandat, parfois accusés de troubler l’ordre public pour avoir simplement organisé des réunions politiques. En 2015, à la veille du scrutin présidentiel controversé qui avait offert un troisième mandat à feu le président Pierre Nkurunziza, le pays avait connu une vague de répression marquée par des disparitions forcées et des violences meurtrières.
D’un cycle électoral à l’autre, les mêmes pratiques semblent se répéter, compromettant ainsi les chances d’un processus démocratique serein, inclusif et crédible.
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Photo : Le bureau du commissariat de police en province de Rutana © SOS Médias Burundi
