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Burundi : climat de tension à Kayanza dès le lancement de la campagne électorale

SOS Médias Burundi

À peine ouverte, la campagne électorale au Burundi est déjà marquée par des incidents préoccupants. À Kabarore, dans la province de Kayanza (nord du pays), un cadre local du parti au pouvoir a provoqué l’émoi en exhibant une arme factice tout en proférant des menaces à l’encontre des partisans de l’opposition. Un comportement en contradiction flagrante avec les appels à l’apaisement lancés par le chef de l’État lors du coup d’envoi officiel à Gitega.

Les tensions ont éclaté à Kabarore, sur la colline Buyumpu, ce vendredi, à l’occasion des travaux communautaires. À cet endroit, l’atmosphère s’est brusquement tendue à l’arrivée de Gaspard Nsabiyaremye, conseiller communal et cadre de la Direction provinciale de l’enseignement (DPE), arborant un uniforme du CNDD-FDD. Dans ses mains, un fusil-jouet imitant une Kalachnikov.

La mise en scène a provoqué la panique chez plusieurs habitants, mais c’est surtout le discours qui a suivi qui a semé l’inquiétude. S’adressant à la foule, Nsabiyaremye a lancé : « Celui qui votera pour le parti CNL saura où aller… » Une déclaration perçue localement comme une menace à peine voilée. Il a également déclaré que cette campagne devait « surpasser celles de 2015 et 2020 », deux échéances où le parti d’opposition avait réalisé des avancées notables dans la région.

Le président appelle à la retenue

Ce même jour, à Gitega, lors du lancement officiel de la campagne, le président Évariste Ndayishimiye adoptait un ton diamétralement opposé. S’exprimant devant des militants et des observateurs, il a exhorté les formations politiques à privilégier une compétition pacifique.
« Les élections ne doivent pas être un champ de bataille. Elles doivent renforcer la démocratie, et non semer la terreur », a-t-il insisté.

Le chef de l’État a mis en garde contre toute forme de provocation ou de violence et a rappelé que le Burundi s’est engagé à tourner la page des pratiques électorales conflictuelles. Il a aussi appelé les forces de sécurité à faire preuve de neutralité et à assurer la protection de tous les citoyens, indépendamment de leurs convictions politiques.

Peur d’un retour aux violences à Kayanza

À Kabarore, les appels à l’apaisement présidentiels semblent bien lointains. Les propos de Gaspard Nsabiyaremye ont ravivé les souvenirs douloureux des violences électorales passées.
« Nous avons peur que le sang coule, car les militants du CNL sont aussi très déterminés », confie un enseignant du lycée communal. Certains habitants évoquent déjà la possibilité de fuir la commune si les tensions s’aggravent.

Réactions et appels à la justice

Plusieurs citoyens réclament des mesures fermes à l’encontre de Nsabiyaremye, qu’ils accusent de semer la terreur. « Ce genre de discours nous ramène en arrière. Nous voulons des élections libres, dans la paix », déclarent-ils.

Du côté du CNL, l’indignation est palpable. « C’est toujours le même scénario : les responsables locaux du CNDD-FDD se sentent au-dessus de la loi. Ils menacent nos membres pendant que l’administration détourne le regard », dénonce un représentant du parti dans la commune de Kabarore. Il en appelle à la Commission électorale nationale indépendante (CENI) pour garantir l’égalité de traitement à tous les candidats.

Alors que la campagne ne fait que commencer, ces premiers incidents jettent une ombre sur la crédibilité du processus électoral. De nombreuses voix s’élèvent pour demander une réaction rapide des autorités afin d’éviter toute escalade et d’honorer les engagements pris au plus haut sommet de l’État.

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Photo : Des militants du CNDD-FDD défilent dans le stade Ingoma de Gitega lors du lancement officiel de la campagne électorale pour les législatives et les communales de juin 2025 © DR