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Cibitoke : 15 fillettes de moins de 10 ans violées en moins de trois mois, l’impunité indigne

SOS Médias Burundi

Cibitoke, 7 avril 2025 –La province de Cibitoke (nord-ouest du Burundi), est secouée par une vague inquiétante de violences sexuelles contre les enfants. En moins de trois mois, quinze fillettes de moins de 10 ans ont été victimes de viols, selon des sources médicales et judiciaires. Une série d’agressions d’autant plus alarmante que la majorité des auteurs présumés restent impunis.

La commune de Bukinanyana enregistre à elle seule cinq cas, suivie de Murwi et Mabayi (trois cas chacune), Rugombo (deux cas). Malgré la gravité des faits, seule la moitié des victimes a eu accès à des soins médicaux appropriés. Pire encore, seulement cinq suspects ont été arrêtés et incarcérés à la prison de Mpimba à Bujumbura, la ville commerciale.

Des violences en hausse constante

Selon les associations de défense des droits des femmes, plus de 7.800 cas de violences basées sur le genre (VBG) ont été enregistrés au Burundi en 2023, dont près de 2.500 cas de viols. Parmi ces cas, plus de 60 % des victimes sont des mineures.

En 2022, ces organisations avaient déjà comptabilisé environ 6 .400 cas de VBG, illustrant une progression préoccupante. Le manque d’accès aux soins, la peur de dénoncer, et la pression sociale aggravent le problème.

Corruption, silence et influence politique

Un défenseur des droits de l’enfant, actif à Cibitoke depuis plus de dix ans, dénonce une impunité « systémique », entretenue par des arrangements à l’amiable, souvent encouragés par des administratifs locaux. À Bukinanyana, une mère accuse un motard présumé coupable d’avoir soudoyé sa libération grâce à des appuis politiques.

Selon une source judiciaire, plusieurs suspects seraient des Imbonerakure ( membres de la ligue des jeunes du CNDD-FDD, le parti au pouvoir) mais aussi des motards et enseignants. Cinq condamnations lourdes ont toutefois été prononcées cette année, certaines à la perpétuité.

Le gouvernement promet des mesures

Face à la pression de la société civile et des organisations féminines, le ministère de la Solidarité nationale a annoncé un renforcement des centres d’écoute et d’accompagnement pour les victimes, ainsi que la création d’une cellule mixte justice-police-santé chargée de traiter rapidement les cas de violences sexuelles.

Le Parquet général a, de son côté, réaffirmé son engagement à lutter contre l’impunité, appelant la population à rompre le silence et à dénoncer toute tentative d’arrangement extrajudiciaire.

« La justice doit primer. Aucune influence politique ou pression communautaire ne doit entraver les droits des victimes, surtout lorsqu’il s’agit d’enfants », a martelé le procureur de la République à Cibitoke.

Des appels à l’action urgente

Les défenseurs des droits des femmes et enfants réclament des actions plus fermes, des sanctions exemplaires, et surtout une protection accrue des victimes et des témoins. « On ne peut pas se contenter de promesses. Ce sont des vies brisées. L’État doit assumer son rôle protecteur », déclare une militante du collectif Women’s Voice Burundi.

Car derrière les chiffres, ce sont des enfances volées et des traumatismes irréparables qui attendent encore justice et réparation.

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Photo : des femmes et des filles sur un point d’eau dans la province de Cibitoke au nord-ouest du Burundi © SOS Médias Burundi